Le Nouvelliste
Cette peur doit appeler la colère
Jan. 30, 2021, midnight
Nous lisons, sur le visage des citoyennes et citoyens du pays, une grande peur, brodée d’angoisse, de confusion, d’inquiétudes, d’incertitudes. La peur bleue qu’inspire ce défilé des chefs de gangs armés, manifestant ironiquement — comme des justiciers, des messies — dans les rues de la capitale contre le fléau du kidnapping. La peur de revivre les jours sombres, terribles du ‘‘peyi lòk’’ avec son cortège de frustrations, de doutes du lendemain, de privations des droits les plus élémentaires. La peur de voir, hypothéquée, une autre année scolaire, payable en entier par des parents appauvris pour des enfants traumatisés, très peu disposés à l’apprentissage. La peur bleue de revivre les coups bas, reniements, atrocités, monstruosités, apatridies et tragicomédies qui accompagnent, généralement, les périodes d’interrègne, les changements de régime dans l’histoire politique de notre pays. Nous, du Rassemblement des Démocrates, Nationaux, Progressistes (RDNP), appelons une juste colère pour dompter cette peur. Il est particulièrement cruel que, dans une société, on assiste à une instrumentalisation politique, à une banalisation du rapt, de la séquestration, du kidnapping d’individus. Ces derniers jours, des écoliers, enseignants, administrateurs d’école, des gens sans le sou, sont la cible privilégiée des kidnappeurs qui étendent leur territoire à toutes les grandes villes et communes. S’il nous reste un peu d’humanité, nous devons faire preuve d’empathie face à la souffrance des familles divisées, démantelées, désagrégées, sous l’effet d’un kidnapping. D’un côté, le kidnappé, terrifié, angoissé, rejette la responsabilité, de chaque jour passé dans l’enfer de ses ravisseurs, sur ses proches parents, même quand il devrait être bien conscient de l’incapacité, pour eux, de collecter la rançon astronomique exigée. De l’autre, les parents du kidnappé doivent, eux, jouer un rôle de négociateur improvisé, mettant leurs nerfs à rude épreuve, en même temps qu’ils suent sang et eau pour payer la rançon de leur infortune. Faire preuve d’empathie face à la détresse de toutes ces familles qui attendent, horrifiées, que sonne pour elles le glas funeste et funèbre du monstre téléguidé, à tête multiple, appelé kidnapping. Dans les deux cas, les familles ne vivent plus ! Il est inadmissible que les responsables de l’État ne manifestent pas toute leur détermination pour venir à bout de ce phénomène, hier encore, étranger à nos mœurs, à notre culture. Il est curieux que les forces saines, vives de la société civile, partis politiques, organisations de droits humains, ne se concertent pas pour une action collective contre les kidnappeurs, auteurs, bénéficiaires et exécutants. Il est impératif que , cette peur , se transforme en source d’une juste, vive et grande colère des opprimés et que s’abatte, sur ces malfrats, apatrides, mangeurs de rêves, la flamme de cette exaspération. Cette colère doit animer les Grenadiers, Guerriers de lumière, Magistratures morales : citoyennes, citoyens de bonne foi, de bonne volonté, de bon commerce qui, eux, souffrent dans leur chair, leur âme, de cette déchéance de la société. Cette colère doit s’exprimer sous toutes les formes, par tous les moyens, sauf qu’elle doit conseiller la justesse du jugement, la mesure des décisions, l’intelligence, la constance et la force des actions à prendre pour sortir le pays du bord de l’abîme. Il est ainsi conseillé, à ceux qui croient encore en la rédemption de la société haïtienne d’élever la voix, de se manifester, de protester. Comme ces pasteurs qui remuent l’histoire de la colère divine, céleste ou déterrent les fondements de la peine de mort dans les Saintes Écritures. Comme ces parents qui dressent avec leurs corps des barricades, exigeant, les mains nues, la libération d’un écolier kidnappé. Pour nous du RDNP, il est désormais antipatriotique d’étouffer la juste colère citoyenne, humaine, face à l’indifférence, l’insouciance de nombre d’acteurs de la classe politique, privilégiant la conquête du pouvoir, le maintien ou la perpétuation au pouvoir par rapport au bien-être existentiel, à la santé mentale et physique des populations. Il est antipatriotique de tolérer, d’encourager des actes répréhensibles, des gangs armés, des criminels, à des fins politiciennes, individualistes ou partisanes au détriment de l’ordre républicain ou démocratique. La fin ne saurait justifier les moyens illégaux, inconstitutionnels, criminels, violant le respect de la dignité et l’intégrité de la personne humaine, bafouant l’espoir des populations de vivre dans un ''État de Droit''. Nous appelons la juste colère des couches saines de la société pour déjouer toutes les manœuvres visant la démobilisation, la désaffection politique, pouvant nous détourner de la direction du chemin, des chantiers des espérances concrètes, constituer des digues à l’effort collectif indispensable pour un sursaut qualitatif vers la régénération de la société. Changer de régime politique, «Changer la vie en Haïti» relèvent de la seule responsabilité de patriotes authentiques, animés par cette folle passion du bien public, du bien généralisé de la société. Aux noms de nos Pères, pour la gloire de nos enfants, construisons une meilleure société. Ensemble, ensemble, ensemble, jusqu’à la victoire finale. Met men, pran desten nou an men. Eric Jean Baptiste Secrétaire Général RDNP