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Le Nouvelliste

Contrat d’électricité : les invités ont décliné la deuxième invitation du parquet

Nov. 27, 2019, midnight

Alors que le commissaire du gouvernement a.i. Jacques Lafontant attendait les responsables de la Sogener et des anciens grands commis de l’État haïtien au parquet près le tribunal de première instance de Port-au-Prince le mercredi 27 novembre 2019, les concernés ne se sont pas présentés. Comme c’était le cas jeudi dernier, seuls des avocats engagés par l’administration Jovenel Moïse ont été remarqués au parquet de ce ressort. Le cabinet d’avocats défendant les intérêts de l’ancien ministre des Travaux publics Frantz Verella estime que la convocation du chef du parquet est émaillée de « menaces ». Entre autres, Me Camille Leblanc souligne à l’attention de Jacques Lafontant les dispositions de l’article 51 du code d’instruction criminelle qui l'oblige à saisir le cabinet d’instruction une fois qu’il aurait décidé de poursuivre. Les avocats critiquent vertement le commissaire du gouvernement à qui il prête l’intention d’obéir à la « volonté du prince ». D’où les suspicions des avocats des prévenus, notamment ceux de Frantz Verella. « Violation de la règle de la compétence et du principe de la séparation entre la poursuite et l’instruction par le cumul des deux fonctions » sont des accusations portées à l’encontre du chef de la poursuite, dont les avocats doutent visiblement de l'impartialité. « L’ingénieur Frantz Verella vous renouvelle, Monsieur le Commissaire du gouvernement par intérim, sa ferme volonté de répondre à toute convocation émanant d’un fonctionnaire légalement compétent et décline humblement toute invitation non conforme à la loi », conclut l’exploit du cabinet, dont une copie est acheminée au CSPJ et à des organisations de droits humains. Dans une note de presse en date du 27 novembre 2019, la Sogener a fait savoir qu’un exploit a été signifié au doyen du tribunal de première instance de Port-au-Prince. « Suite à leur invitation avec menaces au parquet par le commissaire du gouvernement a.i. près le tribunal de première instance de Port-au-Prince, Jean Marie Vorbe, Dimitri Vorbe, Roger Lefèvre, Réginald Vorbe et Elisabeth Débrosse Préval, respectueux de la justice, ont répondu, à l’initiative de leurs avocats, par la signification audit commissaire du gouvernement, par voie d’huissier, d’un exploit d’assignation devant le doyen, gardien de la liberté individuelle », lit-on dans la note. Aucun des responsables de la Sogener n'est venu au parquet de Port-au-Prince mercredi, par rapport au recours préventif intenté par leurs avocats. Ces derniers ont justifié leur action en alléguant au doyen du tribunal la menace de liberté qui pèse sur leurs clients. L’audience relative à ce recours est fixée au jeudi 28 novembre 2019 à 10 heures du matin. « Le doyen peut rejeter leur demande en évoquant l’inexistence d’arrestation et de détention selon l’article 26 alinéa 1 et 2 de la Constitution. Ces avocats doivent compléter leurs actions avec les articles 7.6 et 25 de la loi mère du pays, sinon, ils exposeront leurs clients à des arrestations qui deviendront légales », a fait savoir Me Guerby Blaise, doctorant en droit pénal et procédure pénale. Reste à savoir si les avocats convaincront le titulaire du tribunal de la menace, ou si le juge rejettera la demande basée également sur une convention. Invité sur Magik9 mercredi matin, le chef du parquet a d’emblée indiqué que les avocats ont fait une lecture erronée de l’article 37 du code d’instruction criminelle. L’article indique ceci : « Hors les cas de flagrant délit prévus par l’article 22 du CIC, le commissaire du gouvernement instruit soit par une dénonciation, soit par toute autre voie, s'il a été commis dans son ressort un crime ou délit, ou qu’une personne qui en est prévenue se trouve dans son ressort, sera tenu de requérir qu’il en soit informé, même de se transporter, s’il en est besoin, sur les lieux, afin d’y dresser tous les procès-verbaux nécessaires, ainsi qu’il sera dit au chapitre des juges d’instruction.» Se basant sur le fait qu’il peut instruire « par toute autre voie », Jacques Lafontant a ajouté qu’il pourrait auditionner les parties afin de former sa conviction. « Il y a une plainte. Je l’ai passée au peigne fin et estimé nécessaire de convoquer les gens pour savoir si je dois classer le dossier sans suite, ou s’il faut le déférer au correctionnel ou au cabinet d’instruction », a renchéri le commissaire du gouvernement par intérim. Estimant qu’il agit de plein droit, le numéro un du parquet a indiqué sur les ondes de la radio que le « parquet prendra telles mesures que de droit dans quelques heures ». Selon lui, les faits ne sont pas encore établis. Le commissaire du gouvernement, dit-il, agit sur la base de présomption. « C’est au juge d’instruction de décider si les faits sont fondés, si les indices sont suffisants », a reconnu Jacques Lafontant, rejetant toute idée que ses actions sont orientées. « Le président ne m’a jamais adressé la parole sur cette question. Le ministre de la Justice non plus. Le ministre, étant mon supérieur hiérarchique, m’appelle pour s’enquérir de l’évolution du dossier », a témoigné Jacques Lafontant, qui se dit étonné du niveau de politisation des dossiers de la République. Malgré qu’il ait demandé la communication des factures, le chef du parquet a souligné que cette action ne signifiait nullement que l’instruction a commencé. « Ce sont des éléments d’information à partir desquels j’allais former ma conviction pour la poursuite que j’aurai à déclencher », a réitéré le commissaire du gouvernement par intérim. Les prévenus ne se sont pas présentés. Les yeux rivent sur le parquet qui a émis un exequatur pour la récupération des sites de Varreux quelques heures après que les prévenus ne s'étaient pas présentés.