Le Nouvelliste
Tentative d’évasion à la prison civile des Gonaïves : un détenu tué et un autre blessé par balle
Nov. 8, 2019, midnight
Après plus de douze heures de tension et de pressions, le vendredi 8 novembre 2019, la police a repris le contrôle de la prison civile des Gonaïves, secouée par une sédition. Les prisonniers, qui n'auraient rien mangé depuis trois jours, revendiquaient de meilleurs traitements. Au cours de l'opération menée par des unités d’élite, un détenu a été tué d’une balle dans le ventre et un autre en est sorti blessé. Les autres détenus ont été transférés vers d’autres centres carcéraux du pays. L’insurrection a débuté dans l’après-midi du jeudi, vers les trois heures. Les prisonniers ont détruit leurs cellules et regagné le hall du centre, un espace de divertissement qui leur sert de cour de récréation. Un pistolet de calibre 9 millimètres appartenant à un agent qui voulait les calmer a été saisi par les protestataires qui, à tout prix, voulaient recouvrer leur liberté. Ils ont semé la pagaille et incendié les archives de l'établissement. Avec le soutien des agents de l’Unité départementale de maintien d’ordre (Udmo) qui ont leur base dans le même espace, un haut dispositif de sécurité a été mis en place. Des tirs ont retenti tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Les forces de l’ordre ont lancé plusieurs bombonnes de gaz lacrymogène dans le hall. Cette stratégie ne faisait qu’attiser la colère des insurgés. Une vive tension a régné dans les parages. Certains riverains, surtout des personnes âgées, ont eu la peur au ventre. Ils craignaient une attaque des civils armés qui parcourent les rues de la cité. Pendant toute la nuit, les policiers sont restés sur leurs gardes. Vendredi matin, après le renfort d’une autre unité d’élite, les autorités compétentes ont donné l’ordre de franchir les murs. Il n’y avait pas eu une grande résistance. Un prisonnier, Rodney Lamour, a été neutralisé et un autre blessé par balle. « Aucun détenu ne s’est enfui », a rassuré Me Sérard Gasius, chef du parquet près le tribunal civil des Gonaïves. Selon le magistrat, environ 400 personnes croupissaient dans cette prison de fortune. L’état de santé de certains prisonniers se détériore. Pas moins de sept d’entre eux se trouvent dans un état très critique. Ils ne peuvent même pas se tenir debout. Le parquetier n’est pas en mesure de dire s’il y a eu des cas de viol dans cette tentative d'évasion, les hommes et les femmes étant détenus dans le même espace. La prison civile « provisoire » des Gonaïves se trouve à Biennac, nord de la ville, dans un ancien dépôt de l’Institut de développement agricole et industriel (IDAI). L’espace a été aménagé à cet effet, à l’initiative du maire de la commune, Neil Latortue. Après l’incident, le responsable a déclaré prendre note. De concert avec les autres autorités concernées, il a dit s’engager à consolider l’espace afin de faciliter le retour des prisonniers. Le coordonnateur de MEDHA Droits humains, Me Michelet Dorgilles, avait dénoncé, à maintes reprises, le problème de sécurité de la prison et son exiguïté. Il avait même menacé de porter plainte contre la mairie et les autres instances concernées pour violation des droits des détenus. D’après Me Dorgilles, ces citoyens sont incarcérés dans des cellules hors norme qu’il a qualifié de « tombes à ciel ouvert ».