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Le Nouvelliste

Personnes handicapées : l’exclusion se poursuit en Haïti

Dec. 3, 2019, midnight

Sous le label du Groupe de réflexion et d’initiative sur le handicap, de nombreuses associations de personnes handicapées éparpillées à travers le pays se sont réunies lundi à la Société haïtienne d’aide aux aveugles (SHAA) afin de se concerter sur leur avenir. Plus de 10 ans après la création du secrétariat d’État à l’Intégration des personnes handicapées (SEIPH), ces derniers estiment être jusqu’à présent négligés. Or, estime Michel A. Péan, coordonnateur national de la SHAA, la dignité de ses pairs n’est pas négociable. Cette année, souligne-t-il, l’ONU célèbre cette journée autour de la promotion et de la participation des personnes handicapées pour atteindre un développement durable. Garantir cette inclusion exige selon lui qu’aveugles, sourds-muets, estropiés, déficients mentaux… aient confiance en eux. « Il faut pratiquer l’estime de soi », a plaidé le docteur Péan, qui ne cache pas son indignation. « Nous commémorons cette journée dans un contexte particulier. Nous pouvons avouer que la famine a tué beaucoup de personnes handicapées », a-t-il regretté. En guise de complaintes, le militant a cité les rapports de la Banque mondiale, du PAM, du CNSA sur l’insécurité alimentaire qui frappe à la porte de près de quatre millions d’Haïtiens. Marginalisées, les personnes à mobilité réduite font davantage les frais de l’insécurité alimentaire, selon le coordonnateur de ladite société. Comme si cette insécurité n’était suffisante pour empêcher les personnes handicapées de jouir de leurs droits, « le banditisme aggrave la situation et entrave leur mobilité encore plus que n’importe quel citoyen », a expliqué Michel Péan, défendant un changement de paradigme au sein de la société haïtienne. Pour mieux orienter les décideurs politiques sur leurs besoins, un cahier de charges constitué de 33 points sera présenté. Le but essentiel de ce cahier est de forcer les acteurs à définir des politiques publiques « sérieuses et inclusives ». Michel A. Péan n’a pas mâché ses mots pour critiquer les autorités qui n’ont alloué que 45 millions de gourdes au SEIPH, soit 45 gourdes pour chaque personne handicapée, dont le nombre s’élève à un million dans le pays », a-t-il révélé. Pour Rose May Legouté César, la crise sociopolitique du pays a effectivement affecté les personnes handicapées. « Cette crise humanitaire nous dépasse », lâche la secrétaire générale du Réseau national pour l’intégration des personnes handicapées (RANIPH), qui en profite pour lancer un appel à l’aide. Pour elle, il ne faut pas s’attarder sur les difficultés sans espérer un renouveau. Cet espoir, le RANIPH entend le prêcher à travers une table ronde dans l’Artibonite, un rassemblement dans les départements du Nord-Est et du Sud-Est, entre mardi et jeudi prochains. Le jeudi 5 décembre, à l’hôtel Le Plaza, la Coalition nationale des organisations pour l’intégration des personnes handicapées réalisera une table ronde sur l’inclusion. La question de l’accessibilité et du droit à un travail y seront abordés. Josué Jean-Baptiste, figure de proue du CONOUPH, a fait savoir qu’ils profiteront de cette journée pour réaliser une activité culturelle au palais municipal de Delmas et distribuer à plus de mille personnes handicapées des kits alimentaires et des bons d’achat. À cette occasion le prix Gérard Léon sera décerné aux personnes et institutions qui, en cette année, se sont distinguées dans la lutte qu’elles mènent pour le respect des droits des personnes handicapées. Le feu Gérard Léon, a rappelé Josué Jean-Baptiste, était orthopédiste ; il a voué sa vie à cette tranche de la population et a servi pendant 49 ans à Saint-Vincent gratuitement.