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Le Nouvelliste

Haïti recule de 21 places au classement mondial sur la liberté de presse

April 21, 2020, midnight

En une année, Haïti est passée de la 62e à la 83e place dans le classement qui évalue chaque année la situation du journalisme dans 180 pays et territoires. Sans ménagement, Reporters sans frontières (RSF) dresse un tableau plutôt sombre de la situation de la presse en Haïti en prenant en compte « l’environnement de travail dangereux et précaire » des journalistes. Le rapport de Reporters sans frontières (RSF) précise que « les journalistes haïtiens sont particulièrement vulnérables et régulièrement pris pour cible lors de manifestations. Certains subissent encore des intimidations et des agressions, notamment pendant les manifestations. Les infrastructures existantes sur l’île ont été considérablement endommagées par les catastrophes naturelles successives. »  Jamais le pays ne s’était retrouvé dans cette position depuis que le classement est établi en 2013. Notre meilleur classement a été la 47e place en 2014. Dans ce rapport cinglant sur la question de la liberté de la presse dans le pays, RSF a souligné que malgré la récente évolution des lois relatives à la liberté de la presse, les journalistes haïtiens sont toujours victimes d’un cruel manque de ressources financières, de l’absence de soutien de la part des institutions et d’un accès difficile à l’information. De plus, l’assassinat du journaliste Néhémie Joseph (2019) et la disparition du photoreporter Vladjimir Legagneur (2018), alors qu’il réalisait un reportage dans un quartier sensible, ont profondément choqué le pays. Depuis 2018, les protestations, souvent violentes, se multiplient à travers le pays contre le président Jovenel Moïse, empêtré dans des affaires de corruption. C’est aussi à partir de cette année que le pays commence à s’enfoncer dans le classement (60e place en 2018, 62e place en 2019, et 83e place en 2020), poursuit ce rapport sur la liberté de la presse. Le RSF souligne au passage que les médias privés, très liés aux intérêts de leurs actionnaires, peinent à exprimer leurs points de vue sans autocensure. En 2017, un projet de loi sur la diffamation a été voté au Sénat, prévoyant de lourdes sanctions contre les journalistes. Ailleurs dans le monde, le RSF présente le coronavirus comme une nouvelle menace pour la liberté de la presse Reporters sans frontières (RSF) estime que la pandémie de Covid-19 amplifie les crises qui pèsent déjà sur le journalisme. L’organisation prévoit que la liberté de la presse sera durement affectée ces dix prochaines années en raison de la pandémie de coronavirus et de cinq crises majeures: crise géopolitique (agressivité des modèles autoritaires), technologique (absence de régulations appropriées), démocratique (dénigrement de la presse et haine des journalistes encouragés par des chefs d’État démocratiquement élus), de confiance (suspicion en hausse envers les médias d’information) et économique (appauvrissement du journalisme de qualité). « La décennie à venir sera décisive pour l’avenir du journalisme. Le droit à une information libre, indépendante, pluraliste et fiable est de plus en plus menacé. Pour que cette décennie ne soit pas funeste pour la liberté de la presse, pour que les journalistes puissent continuer d'exercer cette fonction essentielle de tiers de confiance dans nos sociétés, notre mobilisation est plus que jamais indispensable », prévient l’organisation Reporters sans frontières (RSF). L’organisation a même déposé une plainte auprès de l’ONU, le 13 avril 2020, pour solliciter la dénonciation des États  qui violent le droit à l’information malgré, au prétexte ou à l’occasion de l’épidémie de coronavirus, et mettent ainsi en danger la santé des personnes, sur leur territoire comme dans le reste du monde.