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Le Nouvelliste

À qui appartient le matériel des sites de Varreux un, deux, trois ?

Feb. 17, 2020, midnight

Lundi, au palais de justice, le juge Félismé Benjamin s’est déclaré incompétent pour statuer sur l’action exercée le 17 janvier 2020 contre les responsables de la Sogener pour escroquerie. En effet, les avocats de l’État haïtien et ceux des prévenus étaient au palais de justice pour défendre les intérêts de leurs clients. L’affaire est intentée parce que, selon la partie civile, les dirigeants de la compagnie avaient profité d’un contrat de gestion en réparation d’un moteur pour s’approprier les biens de l’État et les donner en gage à des prêts bancaires. Ce qui constituerait une escroquerie en vertu des dispositions de l’article 337 du code pénal. Aux débats particuliers, Mes Monferrier Dorval, Stanley Gaston, Martine Chevalier, entre autres, ont soulevé in limine litis une question préjudicielle de droit de propriété. Les juges répressifs ne sont pas qualifiés pour résoudre cette question de droit civil, de droit administratif ou de droit commercial dont l'examen et la solution exigent l'ajournement de la poursuite pénale. Pour ces avocats, les moteurs et transformateurs répartis sur l’ensemble des trois sites de Varreux sont la propriété de la compagnie fournisseur d’électricité. À cet effet, ces derniers ont demandé au tribunal de décliner sa compétence et surseoir à l’affaire jusqu’à ce que le tribunal de première instance, en ses attributions civiles, définisse à qui appartiennent les objets litigieux. Cette demande s'appuie notamment sur l’arrêt du 6 février 1945, apposée au bas de l’article 158 du Code d’instruction criminelle, annotée par Me Jean Vandal. Selon les avocats de la partie défenderesse, les deux parties ne contestaient point la propriété des moteurs Cummings et des transformateurs avant le procès. Il n’existe aucun contentieux du droit de propriété. Cette exception de la partie adverse est prématurée, à en croire Me Osner H. Fevry. Se basant sur l’article 166 du Code d’instruction criminelle, la batterie d’avocats a demandé au juge de poursuivre l’audience, d’auditionner les témoins, de lire les pièces et de prendre les déclarations des prévenus. Quant à lui, Me Fritz Gérald Cérisier a évoqué un arrêt du 16 décembre 1947 afin de soutenir que l’exception préjudicielle du droit de propriété est dilatoire et tend à retarder une action en justice. «Elle n’est point d’ordre publique», a indiqué le ministère public dans ses conclusions. Malgré l’arrêt du 22 octobre 1952, le représentant de la société au procès a souligné que le juge correctionnel, dans la recherche de la vérité, peut prendre  toutes les mesures que la loi met à sa disposition. «Qu’il plaise au juge de joindre l’exception au fond et d’ordonner la comparution des parties», a indiqué le substitut commissaire du gouvernement. Cependant, le juge Félismé Benjamin a admis, en vertu de l’exploit de la Sogener en date du 11 décembre 2019, qu’une action découlant du droit de propriété a été posée. Les faits sur lesquels il devrait statuer tirent leur genèse de la question soulevée. Pour le magistrat, les deux parties revendiquent réellement leur droit réel sur les moteurs et les transformateurs. Il s’est donc déclaré incompétent, sursoit à l’instruction de l’affaire jusqu’à ce que le tribunal civil (le juge pétitoire) établit à qui appartiennent les biens revendiqués.