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Le Nouvelliste

Léonie Hermantin : non à l’ingérence de l’internationale, oui à une nouvelle approche  dans le dossier Haïti

Dec. 13, 2019, midnight

« La communauté internationale devrait mettre un terme à ses interférences dans les affaires internes d’Haïti et arrêter de dicter dans les coulisses des solutions qui ne marchent pas », a appelé Mme Léonie Hermantin, interrogée jeudi par le journal Le Nouvelliste, deux jours après son audition au Congrès des États-Unis sur la crise haïtienne. La narrative soulignant que les acteurs haïtiens sont mauvais quand tout va mal, qu’Haïti est un État failli, un cas perdu doit changer, a soutenu cette académique de haut vol, cheville ouvrière de Sant La et activiste dans la communauté haïtienne de Miami. Il faut que le blâme soit partagé. « Les maîtres de la marionnette, ceux qui contrôlent l’issue des élections, ceux qui imposent leurs priorités géopolitiques au peuple haïtien ne partagent pas le blâme. Ils sont remis en selle parce qu’ils essaient de nous aider », a souligné Léonie Hermantin, estimant que le support à cet État en dysfonctionnement doit changer.   « Il doit y avoir la volonté d’écouter le peuple haïtien qui ne demande qu’à être écouté depuis près de deux ans maintenant. En appelant au dialogue entre la société civile et le gouvernement haïtien, la communauté internationale doit se rappeler ce vieux slogan de manifestation : pas de justice, pas de paix », a-t-elle indiqué, appelant le Congrès des États-Unis à reconnaître les demandes de « millions de manifestants » qui appellent au respect de la loi. Le Congrès a supporté les manifestants à Hong Kong mais ignore les appels du peuple haïtien en faveur de la justice et la reddition de comptes, a indiqué Léonie Hermantin, soulignant que la pauvreté, la corruption, la mauvaise gouvernance, le non-respect de la loi, la faiblesse des institutions sociales suscitent à la fois honte et embarras. « Nous sommes très préoccupée que plus de 50 % de la population ayant plus de 25 ans n’a rien à offrir à ses enfants. Il n’y a pas de garantie d’une éducation de qualité, il n’y a pas de perspective d’emplois dignes en Haïti où les transferts de la diaspora représentent 30 % du PIB », a-t-elle indiqué. La voie de sortie pour Haïti passe par l’éducation, des infrastructures de santé robuste, des investissements dans l’agriculture, la création d’emplois et des réformes constitutionnelles plus importantes, a soutenu Léonie Hermantin. « Nous sommes frustrée par le fait que notre gouvernement, aux États-Unis, échoue à impliquer la diaspora haïtienne dans les programmes qu’il finance en Haïti. Nous sommes préoccupée parce que des milliards de dollars ont été investis dans des programmes ayant échoué sans jamais qu’il y ait d’explication… », a poursuivi Léonie Hermantin, qui a recommandé au gouvernement américain de travailler en partenariat avec les autorités locales, des experts de la diaspora en guise des grandes ONG. « Nous avons besoin d’être plus créatifs et arrêter d’utiliser les stratégies sans succès avec les mêmes acteurs qui proposent les mêmes programmes avec des changements de noms pour obtenir les mêmes résultats. Le peuple haïtien et la diaspora demandent plus de responsabilité et de transparence de l’USAID », a indiqué l’activiste dans cette interview au journal Le Nouvelliste. « Nous encourageons avec empressement les décideurs politiques aux États-Unis à supporter le programme contre la corruption à la frontière parce que cela aura des effets bénéfiques sur la gouvernance locale. Nous savons que des centaines de millions de dollars sont siphonnés et cachés dans des comptes offshore. Il est temps de retourner ces fonds au peuple haïtien », a indiqué Léonie Hermantin. Interrogée sur le fait que l’intérêt des démocrates à Haïti est purement électoraliste dans la perspective de l’élection présidentielle de 2020, Léonie Hermantin a indiqué que la majorité des Haïtiens de l’État de la Floride sont enregistrés démocrates. Donc, il est parfaitement normal que le Parti démocrate se penche sur les préoccupations de ces alliés fidèles et importants. En plus, le Parti démocrate a historiquement supporté les campagnes de la communauté haïtienne sur des questions liées à l’immigration et tout récemment sur l’extension du TPS pour 50 000 Haïtiens, a expliqué Léonie Hermantin. En ce qui concerne les appels à la démission du président Jovenel Moïse, Léonie Hermantin se range du côté du peuple. « Ce que je peux dire est que je supporte les appels au changement lancé par le peuple. Pas simplement un changement de têtes mais un changement systémique qui tracera la voie vers l’Haïti pour laquelle nous prions tous », a confié Léonie Hermantin, fille de  Fernande Scott Hermantin à qui elle doit son amour d’Haïti. Roberson Alphonse        Léonie Marie Hermantin est née en Haïti, a grandi à New York. Sa carrière reflète son engagement auprès des communautés dont elle travaille au développement. Elle a plus de 20 ans de travail avec la communauté haïtienne à Miami. De 1996 à 2008, elle a travaillé comme professeur visiteur à la Faculté d’architecture de  Florida International University (FIU). Elle a été directrice exécutive de la Haitian American Foundation (HAFI). Leonie Marie Hermantin a été également vice-présidente de Lambi Fund of Haiti qui s’intéresse aux besoins des populations rurales. Elle est détentrice d’un Juris Doctorate de University of California at Berkeley et d’un master en planification urbaine et environnementale.