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Le Nouvelliste

La Covid-19 rouvre les débats sur la médecine traditionnelle

Aug. 24, 2020, midnight

« La Covid-19 vient de nous rappeler l’importance de la médecine traditionnelle (MT) dans notre pays. Nous devons la valoriser, la structurer », a lancé d’entrée de jeu Louksorby Dupré, jeune pharmacien qui est également PDG de NaturOphyte, un organisme communautaire qui œuvre à la valorisation de la médecine traditionnelle. Ce jeune pharmacien, qui s’est orienté par passion vers la MT, intervenait sur « l’avenir » de cette médecine en Haïti, lors de la deuxième édition de la Journée haïtienne de la liberté. Organisée les 21 et 22 août derniers par l’Académie de formation et de perfectionnement des cadres, cette activité a mis en valeur l’importance de la médecine traditionnelle en Haïti. Le symposium lui a été consacré. Plusieurs éminents professeurs d’universités, dont le Dr Hugues Henrys, ont fait valoir leur point de vue dans ce débat. Dans son intervention, Louksorby Dupré n’y est pas allé par quatre chemin pour exprimer son incompréhension du sujet. « La médecine traditionnelle a joué un rôle important dans la lutte pour l’indépendance de notre pays.  Malheureusement aujourd’hui, c’est un secteur très dévalorisé. C’est l’impression. Je veux attirer votre attention sur cette médecine. Dans les zones reculées, elle constitue la seule source de soins disponibles », a-t-il indiqué, affirmant qu’il s’est rendu dans plusieurs sections communales qui sont dépourvues de toute structure sanitaire. Dans certaines zones, c'est l'absence totale de dispensaire et de pharmacie. Les habitants de ces communes parcourent des kilomètres pour se rendre au centre-ville afin de se procurer un médicament. A l’instar de Cuba et même de la Chine, le PDG de NaturOphyte croit qu’Haïti doit se lancer sur le chemin de l’organisation de la médecine traditionnelle haïtienne, ne serait-ce que pour combler les lacunes de notre système qui n’offre des soins de santé qu’à une frange de la population (31% selon le rapport des statistiques de 2016). Afin d’en arriver là, il soutient que « l’avenir de la médecine traditionnelle repose sur la reconnaissance légale par le ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), l’intégration des services de la MT dans le système national de santé et l’établissement d’un cursus des professionnels de la santé ». Le professeur Jean Hugues Henrys, citant des études réalisées en Haïti, fait savoir que la médecine traditionnelle est dominante dans le pays. Une étude réalisée sur l’automédication traditionnelle par Clerismé en 1979 montre que les médications à domicile sont pratiquées au premier rang pour 71, 6 % des symptômes des malades. L’étude de Rouzier atteste que sur l’ensemble des affections étudiées, soit 47, un taux supérieur à 80% a été retrouvé pour une trentaine d’affections. Pour lui, il faut assumer l’identité propre de chacune des médecines. Le Dr Henrys, qui intervenait également sur l’offre de soins de santé en Haïti, a expliqué qu’il existe certes une offre de soins dans ce pays, mais elle est inégalement répartie et incomplète dans la majorité des institutions de santé. On dénombre 40% de la population qui ne vont jamais à l’hôpital quand ils sont malades, selon Kerby Jospeh, étudiant en pharmacie. 90% de la population utilise et la médecine conventionnelle et la médecine traditionnelle pour soigner ses maux. Pour lui, les médecines traditionnelle et conventionnelle sont complémentaires. Chacune a son importance. Elles peuvent cohabiter. L’étudiant plaide en faveur d’une médecine traditionnelle avancée dans le pays. Il revient à l’État, ajoute-t-il, de l’organiser.