Le Nouvelliste
Le MTPTC peine à justifier l’utilisation de 80 millions de dollars pour l’acquisition d’équipements
Aug. 20, 2020, midnight
D’abord, la Cour des comptes a dit constater que le MTPTC n’a pas fourni l’évaluation des besoins et l’estimation des coûts du projet ‘’Acquisition d'équipements’’, au motif que ce projet avait été élaboré et mis en œuvre sous l’égide de la loi d’urgence. « Cette déficience amène la Cour à déduire que le projet a été engagé sans qu’un plan complet des besoins ainsi que les termes de référence y afférents aient été produits pour encadrer de manière efficace la bonne exécution des travaux. En conséquence, les coûts y afférents n’ont pas été évalués de façon détaillée. Cette lacune constitue une irrégularité ayant causé préjudice au projet et à la communauté, compte tenu du caractère structurant du projet pour la communauté », a condamné la CSC/CA. En ce qui concerne le processus d’octroi du contrat, la documentation et l’information pertinentes y afférentes n’ont pas été fournies à la Cour par le MTPTC, « au motif que ce projet avait été élaboré et mis en œuvre sous l’égide de la loi d’urgence. Il s’agit d’une défaillance que les ravages du séisme du 12 janvier 2010 ne sauraient justifier. À titre d’exemple, le MTPTC aurait pu recourir à la méthode alternative de reconstitution partielle ou totale de cette importante documentation contractuelle en utilisant une simple technique de confirmation directe auprès du MEF, des fournisseurs et des banques », a expliqué la CSC/CA. « Cette lacune constitue une irrégularité ayant causé préjudice au projet et à la communauté, compte tenu de l’importance des fonds publics en cause », a tancé la Cour des comptes. La Cour souligne aussi n’avoir pas pu vérifier sur place les pièces justificatives supportant les dépenses présentées dans le rapport fourni par le comptable en chef du MTPTC au motif que « le séisme du 12 janvier 2010 avait occasionné la perte des documents comptables et administratifs du ministère ». Pour compenser cette absence de documents, la Cour avait procédé à une revue des transactions bancaires. « Cette alternative avait alors permis de constater que le MTPTC avait un compte en dollars américains domicilié à la BRH. Ouvert en date du 29 septembre 2008 et répondant au numéro 111057182, ce compte avait reçu un virement de 80 000 000 de dollars pour l’acquisition d’équipements », lit-on dans le troisième rapport de la CSC/CA. En revanche, la Cour des comptes a fait remarquer n’avoir constaté aucune irrégularité sur les dépenses réellement allouées de 59 988 835 dollars à l'acquisition des équipements. Cependant, « sur les transferts de 19 999 975.48 dollars vers le Centre National des Équipements (CNE) par les responsables du MTPTC, la Cour s’attendait à retrouver les documents sur le mécanisme de suivi mis en place pour s’assurer de l’utilisation optimale de ces ressources. Malheureusement, un tel mécanisme de suivi n’avait pas été mis en place par le MTPTC. » Une telle lacune, a dénoncé la CSC/CA, constitue une irrégularité au cadre réglementaire et aux bonnes pratiques de gestion. Conformément à l’article 67 de la loi du 11 septembre 1985 sur le budget et la comptabilité publique, la Cour a dit s’attendre qu’un tel suivi soit mis en place, car comme le stipule cet article, « le comptable de deniers publics est responsable personnellement et pécuniairement des fonds et des biens dont il a la charge, la gestion ou la garde ». En outre, la Cour des comptes a fait remarquer que l’analyse des informations mises à sa disposition dans le cadre du présent mandat révèle aussi quelques irrégularités de nature administrative. Par exemple, « faute de documentation détaillée, la Cour n’a pas pu s’assurer que les acomptes de 2% ont été prélevés et versés à la DGI sur les 340 équipements lourds acquis par le MTPTC. » La Cour des comptes a révélé qu’outre les 8 318 629.80 dollars utilisés par le CNE pour son fonctionnement, elle n’a pas obtenu de détails de l’utilisation qu’avait fait le CNE de la balance des transferts de 11 681 345.68 dollars virés sur ses divers comptes par le MTPTC. « Il en est de même dans le présent rapport, la Cour n’a pas pu retracer la documentation sur le suivi des travaux réalisés par le CNE. Cette défaillance dans la supervision des travaux constitue une irrégularité qui peut causer préjudice au projet et à la communauté », a dénoncé la Cour. Selon la Cour des comptes, le MTPTC n’a pas fourni les rapports de suivi, les lettres de réception provisoire, les rapports des déficiences ainsi que les rapports de réception définitive afin d’attester de la conformité de la livraison des équipements. Pour la Cour, « il s’agit d’une déficience significative des moyens de contrôle applicables aux projets d’investissement qui constitue une irrégularité ayant causé préjudice au projet et à la communauté, compte tenu de l’importance de l’investissement et des fonds publics en cause. Enfin, l’absence de documentation n’a pas permis à la Cour de confirmer que les 2% d’acompte ont été prélevés en application de la réglementation. » La Cour des comptes impute le premier niveau de responsabilité à Jacques GABRIEL, ministre, ordonnateur principal des dépenses ; Evelt EVEILLARD, directeur général ; Louis Frantz JEUNE, directeur administratif ; Horold GERMAIN, conseiller financier et Willy ROCHE, comptable en chef. Ensuite, aux responsables du Centre National des Équipements (CNE) impliqué dans l’utilisation d’environ 20 millions de dollars que le MTPTC leur avait transférés.