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Le Nouvelliste

Aux ordres des salauds ou le cauchemar du subalterne

Jan. 21, 2020, midnight

Il y a les individualités monstrueuses, les PHTK, la bande à Bodeau, une partie du patronat, cupide, raciste et méprisante, quelques plumes viles, tel officiel ou « élu » n’ayant jamais proposé autre chose que le spectacle de la grossièreté et de l’ignorance. Il y a les prédateurs sans vergogne… Cela doit-il nous faire croire qu’il n’y a qu’eux ? Je pense souvent au calvaire et au cauchemar du petit employé de banque, honnête et méticuleux, qui voit passer les chèques, les transactions frauduleuses. Au cadre moyen d’un ministère ou d’un organisme autonome témoin du népotisme, de la routine de la corruption. À tous ces agents de la fonction publique qui auraient simplement aimé pouvoir faire leur travail correctement, rentrer chez eux le soir et dire à leurs proches que la journée a été rude, qu’ils espèrent qu’un avancement mérité les récompensera un jour mais qu’ils sont fiers d’avoir servi la république. Je pense à cette souffrance qu’ils doivent porter en eux, à la salive qu’ils doivent avaler chaque fois que leur position dans la hiérarchie les oblige à dire : « Oui, monsieur le ministre. Oui, Monsieur le directeur. » Il n’est pas donné à tous d’avoir la volonté des héros. Il y a le spectre de l’isolement, de la stagnation, du placard, de la mort parfois. Un jour ils finissent par mettre de côté leurs rêves, leur conscience, leur savoir et leur savoir-faire, leur dignité,  et se contentent de faire ce qu’on leur demande sans trop se poser de questions. La décennie de l’après-séïsme, en ses deux composantes majeures, l’affaiblissement du pouvoir de l’État dans une république d’ONG et d’organisations internationales, de dépendance généralisée ; le degré de corruption, d’incompétence et de mépris de la chose publique, a fragilisé plus que jamais la fonction publique haïtienne. Difficile de croire en sa mission, la routine étant devenue de servir, d’obéir, sans que la question de l’intérêt  général  ne se pose. Fonctionnaire est presque devenu synonyme de suspect. Des gens doivent souffrir de cette image, qui ne demandaient qu’à bien faire leur travail. Lorsque, obligé pour une quelconque raison administrative d’avoir à faire avec un service public, on rencontre un ou une fonctionnaire faisant bien son travail, obéissant à sa mission et à la loi, on est heureux. Heureux et triste en même temps. Son pouvoir est limité, et il ou elle s’excuse pour ces choses qui se passent au-dessus de sa tête. Triste devant cet aveu d’impuissance. Dans quelques services et institutions, il reste quelques chefs dignes de ce nom. Heureux sont ceux qui travaillent sous leurs odres. Ayons une pensée pour les autres qui vivent au quotidien le cauchemar du subalterne. Pour eux aussi, pour qu’ils retrouvent une fierté, un idéal, il faut mettre fin au règne Moïse/PHTK.