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Le Nouvelliste

Youri Latortue critique le décret portant sur la carte d’identification nationale unique.

June 19, 2020, midnight

Ce décret qui, en principe, devait combler un vide légal sur la carte d’identification nationale généralement appelée carte Dermalog, ne fait que jeter de l’huile sur le feu, selon Youri Latortue.  « Le titre du décret élimine la carte Dermalog sur laquelle il est écrit carte d’identification nationale. Or dans le décret, fait remarquer l’ex-sénateur, on parle à présent de carte d’identification nationale unique ».  Selon l’article 6.1 du décret, la CINU comporte au total seize éléments d’informations tels que le nom, le prénom, la date de naissance, le lieu de naissance et l’adresse du détenteur. « Sur la carte Dermalog, il n’y a que douze éléments d’informations », selon Youri Latortue, estimant que la carte Dermalog et la CINU constituent deux documents d’identification différents.  L’ancien parlementaire souligne que le décret publié le 16 juin fait référence à des articles du code pénal qui n’existent pas. « Le décret fait référence à l’article 1008 du code pénal. Le code qui est en vigueur ne comporte qu’environ 420 articles », signale Youri Latortue.  Sur cette question, le secrétaire général du Conseil des ministres, Rénald Lubérice, a déclaré jeudi sur son compte Twitter que « le décret sur la carte d’identification nationale a été adopté en même temps que le décret portant sur le code pénal. Il va de soi qu’il se réfère au nouveau code. Ce sont plus de 43 textes en souffrance au Parlement qui ont été adoptés sans modification majeure ».  M. Latortue dénonce le gouvernement qui en profite pour lancer un autre débat de société. L’article 5 du document mentionne que « toute personne, ayant subi des changements morphologiques, fait la mise à jour y relative dans deux mois qui suivent ces changements au bureau de l’Office national d’identification ». « Dans le droit haïtien, c’est le principe de l’indisponibilité du corps humain qui prévaut. On ne peut intervenir sur le corps humain que pour des soins. Le droit haïtien ne permet pas que l’on change son sexe », rappelle Youri Latortue, qui voit dans ce décret une manière de légaliser le mariage des gens de même sexe. L’ex-sénateur rappelle qu’un débat a été lancé au Parlement sur cette question mais se rendant compte que la « société n’était pas prête » les parlementaires l’ont abandonné. « Imaginez-vous une loi qui a été retirée de l’ordre du jour au Parlement parce qu’elle nécessitait plus de débats et qui est maintenant adoptée dans un alinéa d’un article dans un décret », s’exclame Youri Latortue. Il estime aussi que ce décret va remettre en question la loi sur la paternité responsable adoptée en 2014.  Le décret accorde jusqu’au 16 octobre, soit 120 jours, à tous les citoyens pour retirer leur carte d’identification nationale unique. À partir de cette disposition toute personne surprise sans cette carte sera passible d’une amende équivalente à 5% de son revenu mensuel ou du salaire minimum mensuel pour les personnes sans emploi. « L’ONI est en mesure de produire 35 000 cartes par semaine, ce qui donne 140 000 par mois ou un million six cent mille par an. Pour le moment, d’après son propre rapport, l’ONI a déjà produit deux millions sept cent mille cartes.  «Mais elle en a délivré environ un million », ajoute Youri Latortue estimant à sept millions cinq cent mille le nombre de personnes qui ont l’âge de la majorité. Les 120 jours ne seront pas suffisants pour produire quatre millions huit cent mille cartes, juge l’ancien président de la commission Éthique et Anti-Corruption au Sénat de la République. Pour produire cette quantité de cartes il faudrait au moins trois ans, a-t-il renchéri. Si le projet est de contraindre un maximum  de citoyens à retirer leur carte d’identification pour prouver à la communauté internationale que le gouvernement est prêt pour les prochaines élections, cela ne tiendra pas, martèle Youri Latortue.  Rapporté pour erreurs matérielles, le décret a été publié ce vendredi sans grandes modifications au niveau du contenu.