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Le Nouvelliste

Adieu M. le professeur Guy Maximilien

Feb. 3, 2021, midnight

Il n’aimait pas les hommages. Il n’aimait pas les cercles, confortables dans leur isolement, surplombant le reste du monde, s’autoapplaudissant. Il aimait les livres. Il aimait enseigner. Quelle meilleure manière d’être à la fois avec les autres, tout en protégeant sa solitude, ses fragilités ? Guy Maximilien s’en est allé le lundi 1er février. Quelques-uns de ses proches affirment qu’il l’avait ardemment souhaité. Il était au bout de tout. Diminué après avoir été agressé à Pétion-Ville, il y a quatre ans, fatigué du constat de la chute quotidienne des choses et des vies dans son pays qu’il ne regardait plus que de biais, le bruit ambiant avait fini par  avoir raison de son regard. Docteur en théologie, Guy Maximilien ne s’étendait jamais sur ses connaissances en la matière face à ses étudiants de l’Ecole normale supérieure qu’il recevait, au milieu des années 90, à la médiathèque de l’Institut français en Haïti  dont il était le directeur. Il régnait sur cet endroit magique, la dernière grande bibliothèque de lecture publique de la capitale qui a assuré, jusqu’à la fermeture de son adresse mythique au Bicentenaire, un service de prêt à domicile. Quel bonheur que c’était de pouvoir partir à la maison pour deux semaines avec le livre de son choix ! Étrangement, nous  gardons surtout des cours de Maximilien ces grandes étagères de livres et quelque chose de très vif de John Dos Passos, Manhattan Transfer, le 42e parallèle, et Femmes de Philippe Sollers. Il savait certainement quels effets ils avaient sur ces étudiants en lettres, issus pour la plupart des quartiers pauvres et courant déjà les écoles afin d’assurer des cours qui leur permettaient de vivre, de pouvoir rester étudiants. Rédacteur en chef pendant une dizaine d’années de la revue franco-haïtienne Conjonction, Guy Maximilien avait lui-même souhaité passer le témoin, faire entrer d’autres figures dans le comité de rédaction. La parcimonie de sa parole faisait qu’on se taisait pour l’écouter. Sa voix sortait, très douce, très assurée. Les silences de Guy Maximilien faisaient sourire ceux qui le connaissaient. Il prévenait d’avance qu’il n’allait pas parler. Comme si son indifférence pour tel sujet devait être évidente pour tous. Nous sommes orphelins, autant que nous sommes admiratifs, de cette liberté. Adieu M. le professeur, cher ami