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Le Nouvelliste

Haïti détruit des richesses et crée de la misère, selon Kesner Pharel

Dec. 26, 2019, midnight

Selon les dernières prévisions de l’Institut haïtien de statistiques et d’informatique (IHSI), le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) cette année connaît une contraction autour de -1,2% et le taux d’inflation, d’après la Banque de la République d’Haïti (BRH), était de 20,3% en septembre 2019. Au-delà de ces chiffres, le numéro un du Group Croissance a attiré l’attention sur la dégradation des conditions de vie dans le pays au cours de l’année 2019.  « Depuis le tremblement de terre de 2010 pendant lequel le taux de croissance était de -5,5%, c’est la première fois qu’on a enregistré un tel niveau de destruction de richesses dans le pays au cours d’une année », a fait remarquer l’économiste Kesner Pharel. D’octobre 2018 à septembre 2019, le taux d’inflation n’a pas cessé d’augmenter en glissement annuel, passant de 14,5% à 20,3%, et en rythme mensuel est proche de 2%. «  Chaque mois, le pouvoir d’achat diminue de près de 2% et de plus de 20% sur un an. Il y a également le taux de change qui a connu une dépréciation d’environ 30%. Quand l’exercice a commencé en octobre 2018, il fallait 71 gourdes pour un dollar américain, et en septembre 2019, le taux de change a atteint près de 93 gourdes pour un dollar», a indiqué Kesner Pharel, regrettant le fait que l’IHSI ne fonctionne pas depuis plusieurs mois. Le taux d’inflation est lié au taux de change. «  On assiste à un effondrement du pouvoir d’achat des Haïtiens pendant les deux dernières années qui résulte de la hausse de l’inflation et du taux de change. Derrière les chiffres, les indicateurs économiques, il y a des personnes. Avec les différents chocs provoqués cette année, il y a des personnes vulnérables qui tombent sous le seuil de la pauvreté. Des personnes qui se trouvaient à la limite du seuil de la pauvreté qui s’enfoncent maintenant dans l’extrême pauvreté. Il y a un nouvel indice qui s’ajoute à la base de la pyramide, c’est la misère qui gagne du terrain avec les pertes d’emploi et l’inflation », a expliqué le pdg du Group Croissance, Kesner Pharel.           Pour faire comprendre l'augmentation du taux d’inflation et du taux de change, l’économiste a fait référence au budget de la République, pour mettre l’emphase sur le déficit budgétaire, les recettes et les dépenses publiques. Le budget qui est en cours d’exécution dans le pays, c’est celui de l’exercice fiscal 2017-2018, a précisé M. Pharel, soulignant l’absence d’un gouvernement légitime dans le pays depuis environ neuf mois. « Quand les recettes publiques sont inférieures aux dépenses publiques, la conséquence n’est autre que le déficit budgétaire. Les recettes n’ont pas atteint 4 milliards de gourdes au cours des mois pendant lesquels les activités ont été paralysées avec le phénomène «peyi lòk». Les prévisions de recette dans le budget 2017-2018 étaient autour de 114 milliards de gourdes. Par conséquent, les recettes publiques devraient atteindre le montant de neuf milliards de gourdes chaque mois. Quand les prévisions de recettes ne sont pas au rendez-vous et que les dépenses se font suivant lesdites prévisions, il revient à la BRH de financer le déficit selon les termes et les conditions de l’accord signé avec le gouvernement », a déclaré le responsable du Group Croissance, soulignant que c’est une année vraiment difficile pour les entreprises, le secteur touristique, entre autres. Kesner Pharel a démontré à l’aide d’une représentation graphique que seul le secteur de la sous-traitance a pu conserver le nombre de ses emplois. Durant la décennie 2010-2019, le taux de croissance en moyenne est de 2,2%. Au cours des cinq dernières années, il est chiffré à 0,8% en moyenne. Entre-temps, le taux de croissance démographique est supérieur à 1,5%. Quand il n’y a pas suffisamment de richesses créées il y a plus de pauvreté et d’extrême pauvreté. « Les désastres naturels et l’instabilité politique sont les deux facteurs qui dérangent le plus l’économie haïtienne. Une étude de la Banque mondiale avait affirmé cette dure réalité. Durant les décennies 2010 et 2019, cette tendance est confirmée avec le tremblement de terre et les chocs politiques », a souligné Kesner Pharel. Au cours de cette décennie, la gourde s’est dépréciée de plus de 130%, passant de 40,29 gourdes à 93, 35 gourdes. Le service de la dette a aussi explosé, malgré les annulations de dettes en 2008 et 2010. Le service de la dette était de 2,2 milliards de gourdes en 2010, il est passé à 21,6 milliards de gourdes.  Le déficit de la balance commerciale s’est élargi puisque les importations ne cessent d’augmenter. Sur le plan financier et économique, les résultats des dix dernières années sont catastrophiques. C’est le bilan des différents gouvernements du pays pour la décennie 2010-2019.