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Le Nouvelliste

L'après danse…  

Feb. 19, 2021, midnight

Le carnaval de Port-de-Paix est une réussite et les millions de gourdes dépensées pour festoyer sur fond de précarité criante. dans le Nord-Ouest est presque anecdotique. La chronique du carnaval sera tenue, on épuisera des mégabits sur les réseaux sociaux à discuter des performances des groupes musicaux ou à apostropher ceux qui ont participé à la réussite de cette fête populaire.  Le carnaval, depuis plusieurs années, est hyperpolitisé. L’exercice cristallise la polarisation de franges de la société. Qu’à cela ne tienne,  Jovenel Moïse tire bien plus qu’une  victoire de prestige en réalisant le carnaval à Port-de-Paix, sa ville d’adoption. Sur le plan symbolique, même avec sa couronne « de roi de carnaval », Moïse est de plus en plus à son aise dans le costume de la « présidence royale ». Son discours, avec des relents violents, des « tapes » annoncées pour des indélicats ayant fait affaire à l’État, l’atteste et des artistes ont fait allégeance et chanté les louanges de «Jojo »  le tout-puissant, comme d’autres l’ont fait pour Duvalier, le dictateur, avant d’exalter la seconde indépendance à sa chute, le 7 février 1986. La marche aux Gonaïves où nichent des opposants armés gonfle un peu plus l’ego du chef.  Mais il y a toujours l’après-danse. C’est un après-danse fait de kidnappings. Ils se sont multipliés. 13 entre dimanche et mercredi, a rapporté Vision 2000 ce jeudi 18 février 2021. C’est aussi le récit bouleversant d’une mère privée de sa fille de cinq ans, kidnappée, tuée et balancée dans un canal le 7 février. C’est un après danse fait d’un changement de ton  vis-à-vis de l’occupant du Palais national, coutumier de la politique du fait accompli avec les États-Unis qui, via Julie Chung, assistante du secrétaire d’État au bureau de l’hémisphère Ouest, ont tancé Jovenel Moïse qui a nommé trois nouveaux juges à la Cour de cassation, en remplacement de trois autres dont la mise à la retraite avait provoqué une mise en garde et l’annonce de l’analyse par des instances internationales de la légalité et la constitutionnalité de cette décision. « Je suis préoccupée par les récentes actions autoritaires et non démocratiques, des nominations et retraits unilatéraux des juges de la cour suprême aux attaques contre des journalistes. Le respect des normes démocratiques est vital et non négociable. @WHAAsstSecty @USEmbassyHaiti », lit-on dans un tweet de l’ambassade des États-Unis le 17 février, traduisant celui de Mme Julie Chung. « Les États-Unis ne resteront pas silencieux alors que les institutions démocratiques et la société civile sont attaquées. Nous condamnons toutes les tentatives visant à saper la démocratie par la violence, la suppression des libertés civiles ou l'intimidation », selon un autre tweet. L’après-danse est celle d’une grève illimitée des juges et un constat troublant du secrétaire général de l’ONU au Conseil de sécurité. « Il est troublant de constater que l’enquête sur l’assassinat de Me Monferrier Dorval commis en août 2020 n’avance pas et que les individus soupçonnés d’avoir participé directement à des violations des droits humains ou à des atteintes à ces droits, comme Jimmy Chérizier, ne sont pas amenés à répondre de leurs actes », a écrit Guterres, soulignant qu’il est « impératif de prendre des mesures concrètes pour protéger les citoyens contre la violence grâce à une action efficace de la police et des autorités judiciaires, notamment en luttant contre l’impunité et en renforçant la responsabilité effective ». Sur le plan politique, l’après-danse a des échéances, référendum, élections et des divisions marquées. « L’année 2021 est l’occasion pour les dirigeants du pays de mettre fin à la période préoccupante de gouvernement par décrets, de restaurer la démocratie et d’accroître la stabilité à long terme », a écrit le secrétaire général de l’ONU qui conseille. « Face aux difficultés politiques persistantes et à un contexte socioéconomique difficile, il convient de faire preuve d’une souplesse maximale et de parvenir à des compromis difficiles pour faire émerger des consensus constructifs ». « Comme les enjeux aussi bien que les risques sont élevés, ce moment décisif exige de l’habileté politique, du leadership et de la retenue de la part des représentants de toutes les tendances politiques », a-t-il enchaîné à un moment où des secteurs de plus en plus nombreux jurent d’en découdre avec ce président royal, au palais de facto.