Le Nouvelliste
Vague de protestation après la publication de l’arrêté nommant le Conseil électoral provisoire
Sept. 22, 2020, midnight
Dans une correspondance envoyée en milieu de journée au président, vice-président et juges de la Cour de cassation, la Fédération des barreaux d’Haïti a fait opposition à la prestation de serment des nouveaux membres du CEP. « Messieurs les président et vice-président de la Cour, Honorables magistrats ; La Fédération des barreaux d’Haïti (FBH) se fait le devoir de vous adresser la présente afin de faire opposition formelle à la prestation de serment des personnalités désignées pour composer le Conseil Electoral Provisoire », lit-on dans la correspondance de la FBH. « L’arrêté publié dans le journal officiel Le Moniteur en date du vendredi 18 septembre 2020 est en effet inconstitutionnel. Les nominations de ces personnalités contreviennent formellement aux dispositions prévues pour la formation d’un tel Conseil et violent frontalement les dispositions des articles 284 et suivants de la Constitution », ont dénoncé les barreaux des 18 juridictions du pays. La Fédération des barreaux d’Haïti a indiqué qu’elle « doit jouer son rôle de garant de la démocratie, à l’instar de la Cour de Cassation de la République, qui se doit de rappeler aux autorités les limites de leurs attributions et le caractère impératif des règles organisant l’Etat de droit.» « De ce fait, la FBH demande instamment aux honorables magistrats de la Cour de surseoir à toute cérémonie de prestation de serment, ce, conformément à la Constitution », conclut la Fédération des barreaux du pays dans cette correspondance qui porte les signatures de Me Jacques Letang, président et de Me Robinson Pierre-Louis, secrétaire général. « Nous dénonçons le président Jovenel Moïse qui continue à violer la Constitution haïtienne et à créer les conditions en vue de l’aggravation de la crise », fait savoir, de son côté, le Secteur démocratique et populaire dans une note dans laquelle il exige le retrait de l’arrêté nommant le Conseil électoral provisoire. Ce regroupement de partis et d’organisations politiques de l’opposition disent prendre acte que Jovenel Moïse, qu’il accuse d’être un « dictateur », n’a pas hésité à violer la Constitution par une simple mesure réglementaire pour faire main basse sur le processus électoral ». Ils accusent le chef de l’État de vouloir contrôler le conseil électoral et choisir ceux qu’ils désirent pour arriver au pouvoir à travers des élections non crédibles. Jovenel Moïse est un danger pour l’avenir de la démocratie et le développement d’Haïti rêvé par tous, ont-ils exprimé. Après la décision relative à l’octroi du contrat à la firme Dermalog pour la réalisation des cartes d’identification nationale unique, la publication de l’arrêté du vendredi 18 septembre constitue pour les membres du Secteur démocratique et populaire la deuxième étape du plan « macabre » qui vise à vassaliser toutes les institutions et saboter tous les progrès réalisés par le peuple haïtien depuis ces trente dernières années en matière de construction démocratique. Les partis et les organisations du Secteur démocratique invitent la nation à rester vigilante à l'égard du président qui, disent-ils, est en train de planifier la violation de l’article 284 de la Constitution qui interdit tout amendement susceptible de déranger le caractère démocratique et républicain de l’État. La FJKL dénonce un CEP constitué par cooptation L’arrêté nommant le Conseil électoral provisoire et fixant sa mission viole l’article 284-2 de la Constitution en vigueur qui dispose que « toute consultation populaire tendant à modifier la Constitution par voie de référendum est formellement interdite ». Le chef de l'État viole également les dispositions des articles 282 et suivants de la Constitution traitant des amendements, selon la Fondation Je Klere. La FJKL dénonce la mise en place d’un CEP par cooptation. Cela « démontre la volonté de l’exécutif d’aggraver la crise politique actuelle par une profonde crise électorale », soutient l’organisation de défense des droits humains qui rappelle qu’historiquement les changements de Constitution intervenus en violation de la Constitution en vigueur et sans aucun consensus politique ont toujours donné naissance à des dictatures féroces et sanguinaires comme ce fut le cas du Dr François Duvalier qui avait instauré la présidence à vie. Soulignant que la résistance à l’oppression fait partie du droit international coutumier, la FJKL demande à l’exécutif de faire le retrait purement et simplement de cet arrêté susceptible d’aggraver la crise sociopolitique actuelle et de renforcer le désarroi du peuple haïtien. Nou pap dòmi appelle à un « leve kanpe final » L’organisation Nou pap dòmi appelle à un dernier soulèvement contre le plan du régime en place de détruire le pays. Les petrochallengers disent condamner l’action du chef de l’État qui « viole la Constitution en formant un CEP illégitime dans le but de contraindre la population à aller dans des élections entachées de sang, de corruption, d’intimidation et d’illégalité ». Les élections sont faussées à la base pour plusieurs raisons, selon les responsables de Nou pap dòmi. « À cause de l’incapacité du président à mettre sur pied un processus électoral inclusif, participatif, à cause de la confection dans des conditions troubles et illégales des « cartes dermalog, à cause de l’insécurité qui paralyse tous les mécanismes nécessaires à mettre en place en vue de l’organisation et la participation dans les élections, et aussi à cause de la corruption qui gangrène le pouvoir en place et qui montre une absence de volonté des autorités d’organiser des élections honnêtes et libres », ont-ils avancé. Nou pap dòmi rejette toute initiative de l’administration Moïse-Jouthe qui n’a ni la légitimité, ni le pouvoir, ni la crédibilité pour changer la Constitution qui aura des conséquences sur la vie de plusieurs millions de personnes dans les prochaines années. « Le moment est venu pour un rassemblement de tous les secteurs, pour un soulèvement final contre le plan du régime de Jovenel Moïse de détruire le pays », lancent les responsables de Nou pap dòmi qui ne veulent pas que la bataille en faveur de la justice sociale et contre la corruption et l’impunité s’arrête. Les élections ne sont pas possibles avec Jovenel Moïse « Le pouvoir continue de s’engager dans une dérive totalitaire. Les derniers décrets en violation flagrante de la Constitution n’en sont qu’une preuve supplémentaire », constate le comité de suivi de la déclaration du 21 août. Confirmant que le processus pour l’élaboration de l’accord final suite à la signature de cette déclaration, le comité de suivi croit dur comme fer que si « la situation globale, sur les plans sécuritaire, économique et social ne fait et ne fera que dégrader tant que Jovenel Moïse restera au pouvoir ». Les élections, dans ce sens, ne sont possibles ni avec Jovenel Moïse ni dans ces conditions, selon Lyonel Trouillot, Yves Lafortune, Louis Gérald Gilles entre autres membres du comité de suivi du rassemblement du 21 août.