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Le Nouvelliste

«Il faut que quelque chose change», l’église catholique appelle à une « solution de sagesse »

Oct. 22, 2019, midnight

Les fidèles catholiques ont marché dans les rues de la capitale, mardi 22 octobre, pour réclamer la démission de Jovenel Moïse. La marche, qui a démarré à l’église du Christ-Roi a été retardée de plusieurs dizaines de minutes. Les responsables de la Conférence haïtienne des religieux, la structure à l’origine de la marche, avait annoncé dans un premier temps l'organisation d'une messe sur place, au lieu d’une marche, en raison des pressions exercées et des préoccupations de la Conférence épiscopale concernant la sécurité des participants. Après moult confusions et palabres, la foule, composée entre autres de fidèles catholiques, de militants de l’opposition, des représentants de la classe politique, a arpenté Lalue, la rue Pavée avant d’atteindre la cathédrale de Port-au-Prince où une messe a été célébrée pour clore la journée. Ce 22 octobre, l’ombre de saint Jean-Paul II n’a jamais été aussi présente en Haïti depuis sa visite du 9 mars 1983. « Il faut que quelque chose change ici », la phrase qu’il a prononcée à l’aéroport de Port-au-Prince, pour appeler à la fin de la dictature duvaliériste, a été sur toutes les lèvres, dans les esprits, sur les pancarte et aussi dans l’homélie de Max Leroy Mésidor, archevêque de Port-au-Prince. Le prélat a questionné ce qui a été  fait depuis. « 36 ans après avoir prononcé cette phrase, qu’est-ce qui a été fait pour améliorer la situation de la population ? Quelles sont les structures mises en place pour changer la situation des démunis ? Quelles sont les politiques mises en place pour accorder la priorité aux pauvres ? Il faut  que quelque chose change dans ce pays. Aussi longtemps que ce n’est pas le cas, il n’y aura jamais de paix », prévient-il.  L’archevêque de Port-au-Prince a plus loin souligné que l’heure est grave, que le pays est en danger. Il a également présenté ses sympathies aux victimes ainsi qu'à leurs familles. « J’ai demandé à la Commission justice et paix de dresser une liste des personnes décédées. Je ne pouvais m’empêcher de pleurer en regardant la liste. Il y a trop de morts dans le pays », a-t-il tonné sous les applaudissements du public.  Monseigneur Max Leroy Mésidor a appelé à une solution de sagesse pour mettre un terme à la crise. « Devant cette situation de malheur et de danger, je lance un appel. Je lance un appel au chef de l’État, aux collaborateurs du gouvernement, aux parlementaires, à la classe politique, à tous ceux qui veulent sincèrement aider Haïti. Je les supplie, au nom de Dieu, d’écouter la voix de la sagesse », a appelé Monseigneur Mésidor. Son appel a été chaudement applaudi avant que l’assistance ne scande « Démission ! ». Cet appel de l’assistance vise directement le président de la République contesté par de nombreux secteurs de la vie nationale. « Je les supplie au nom de Dieu de consentir les sacrifices les plus admirables afin de trouver une solution rapide à cette crise », a-t-il poursuivi. Le président du CHR, le père Éric Jasmin, a remercié les milliers de participants d'avoir pris part à la marche et à la messe. « Nous sommes l’Église, l’Église c’est nous. Aujourd’hui nous avons marché, nous avons prié. Selon l’évangile de Jésus-Christ, il faut associer la prière au jeûne. Nous vous invitons à jeûner vendredi prochain », a-t-il appelé, demandant aux participants de tenir ferme.  Avant cette marche, la Conférence haïtienne des  religieux, dans une note de presse rendue publique vendredi dernier, a demandé aux dirigeants de tirer les conséquences de leurs inconséquences et et d'écouter la voix du peuple qui est la voix de Dieu. « Considérant la crise humanitaire sans précédent dans laquelle le pays bascule ; considérant que cette crise est la résultante d’une crise beaucoup plus profonde touchant les fondements même du vivre-ensemble dans des dimensions politique, économique, sociale, et religieuse ; considérant la faillite totale des institutions républicaines et la responsabilité des élites politiques, intellectuelles, et économiques dans le pourrissement de la situation, les religieux interpelle la conscience de tous et de chacun, notamment le chef de l’exécutif, afin qu’il prenne acte de la gravité de l’heure et prenne en conséquence une décision sage pour Haïti », pouvait-on lire dans la note dans laquelle les signataires ont également indiqué la fermeture de ces institutions jusqu’à ce qu’un dénouement heureux de la crise soit trouvé dans le meilleur délai.