this used to be photo

Le Nouvelliste

Mirlande Manigat plaide pour un accord politique sur la nouvelle Constitution

June 16, 2020, midnight

La présidente d’honneur du RDNP, Mirlande Manigat, a été l’invitée de la matinale de Magik 9 ce lundi. Ce week-end, la spécialiste en droit constitutionnel s’est prononcée sur le mandat du président Jovenel Moïse qui, selon elle, prendra fin le 7 février 2021. Mirlande Manigat a indexé la Constitution de 1987 qui, selon elle, est à la base de cette confusion. « Plus je travaille sur la Constitution de 1987, plus je me rends compte qu’elle est source de problèmes. La Constitution est un texte de loi. En tant que tel, elle doit être précise, bien écrite et présenter aucune ambiguïté. Je sais que cela peut déranger les constituants, mais ce texte est la source de beaucoup de problèmes que nous avons connus », a déclaré la présidente du RDNP qui, au passage, a souligné que la question du mandat présidentiel a engendré des problèmes dans toutes les Constitutions depuis 1843.  Pour résoudre la crise actuelle, Mirlande Manigat prône l’adoption d’une nouvelle Constitution. Celle-ci, selon elle, demeure l’unique alternative. « L’amendement constitutionnel n’est pas possible de toute façon. Je suis pour une autre Constitution. Il faut rédiger une autre Constitution. Il faut qu’elle soit applicable », a-t-elle fait savoir, ajoutant que l’un des éléments fondamentaux de la construction démocratique est le fait que le droit est inattaquable dans ce qu’il stipule ou non. « Si l'on n’est pas d’accord avec un texte de loi, on ne peut pas l’interpréter, on n’a qu’à le changer. C’est la même chose pour la Constitution. Le langage du droit n’est pas négociable », a-t-elle soutenu.  La spécialiste en droit constitutionnel a fait part de ses inquiétudes sur ce qui pourrait se passer après le 7 février 2021. « Je ne sais pas ce qui va se passer au lendemain du 7 février 2021 », a-t-elle admis. Entre-temps, elle a fait remarquer que la situation se détériore sur le plan économique et social. « L’insécurité fait rage. À cela s’ajoute la pandémie de coronavirus. Il y a donc une accumulation de problèmes », a-t-elle décrit. Madame Manigat plaide pour un accord politique entre les acteurs pour sortir de la crise. « Historiquement, de part et d’autre, il y a toujours eu des accrocs à la Constitution, notamment dans des contextes particuliers. On a des décisions à prendre mais on ne dispose pas de moyen constitutionnel de le faire. Dans ces conditions, les présidents improvisent. Les improvisations enterrent davantage le système politique haïtien. Je ne sais pas ce qui va se passer dans le contexte actuel. Mais si l'on doit encore improviser, il faudrait avoir un consensus sur celle-ci », a-t-elle plaidé. Elle invite le président Moïse à faire les premiers pas. « Il faut faire des concessions », a-t-elle tranché, sans fournir de détails.  Mirlande Manigat a mis en garde le président Jovenel Moïse sur l’éventuelle formation d’une assemblée constituante dans la perspective d’une nouvelle Constitution. Elle exhorte le président à ne pas tenter d’influencer cette éventuelle assemblée. « Il faut faire appel à l’histoire. De nos 22 Constitutions, 11 ont été rédigées par une Assemblée constituante, mais toujours dans des contextes bien particuliers. Par exemple, en 1986, c’était le contexte idéal pour préparer une autre Constitution. L’Assemblée constituante a été formée de 61 membres, parmi lesquels 40 ont été élus par les arrondissements. [...] Comment va-t-on procéder pour former la nouvelle assemblée constituante ? Qui en fera partie ? Est-ce qu’ils seront tous des partisans de l’exécutif ? Si oui, ce sera la porte ouverte à un échec. Je ne sais pas si c’est ce que va faire le président Moïse. Mais je le mets en garde, car dans l’histoire des assemblées constituantes, le régime au pouvoir avait toujours tenté de les influencer. C’est ce qu’a fait le président Sténio Vincent avec la Constitution de 1935. Il ne faut pas s’aventurer dans cette voie. Ce serait un échec », a-t-elle prévenu.