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Le Nouvelliste

Jovenel Moïse ou l’urgence de jouer cartes sur table…

Feb. 7, 2020, midnight

Le président Jovenel Moïse boucle ses trois ans au pouvoir, vendredi 7 février 2020. Son bilan, catastrophique, est palpable. Il est dans le cœur de toutes les victimes de l’insécurité et de leur famille, dans les assiettes vides et les poches crevées, dans les yeux remplis d’angoisse des capitaines d’entreprises et des investisseurs qui n’ont aucune lisibilité sur l’avenir. Il n’y a toujours pas de gouvernement, pas d’argent frais et les indicateurs macroéconomiques sont encore au rouge foncé. Le président Moïse prend son temps. Il ne dit pas clairement qu'il ne veut pas écourter son mandat ni qu'il refuse qu'on lui choisisse un Premier ministre dans le cadre d’un accord politique optant pour la cohabitation. Il ne dit pas le contraire non plus.  Il ne dit pas s’il se méfiera d’un Premier ministre ayant un discours, un carnet d’adresses et des ambitions politiques. Il ne dit pas s’il serait inconfortable ou non avec un PM qui lui ferait de l’ombre, sans majorité au Parlement pour lui faire un sort à la Céant. Le président Moïse reste dans le gris, entre les lignes, ne dit rien de ses éventuels inconforts avec un chef de gouvernement imposant, disposant de certains leviers de pouvoir et des ressources publiques. Le chef de l’État, mis sous pression par les Américains et le reste de la communauté internationale, est contraint de dialoguer. Autour de la table, s'attroupent ses partisans et alliés, les artisans de l’aggravation de la précarité socioéconomiques et coresponsables du recul de la démocratisation en Haïti. Il y a aussi ces opposants estampillés « ouverts », « non radicaux ». Le président Jovenel Moïse n’est cependant pas dupe de la versatilité de certains d’entre eux, friands d’oasis. Certains, tout récemment, au temps du « peyi lòk », s’alignaient avec « des radicaux » qui demandent son départ immédiat et ordonné. S’il n’est pas facile d’être dans les souliers de ce président, il est clair qu’il ne pourra plus continuer à jouer la montre, à aller loin sur la monture du marron, à garder la main dans ce poker menteur. Le président n’a plus de fusible et son stock d’excuses est quasiment épuisé. Le président Jovenel Moïse, même avec les pleins pouvoirs, n’est pas en zone de confort. Son incapacité à sacrifier ses envies au profit d’une issue à la crise institutionnelle risque de mettre en danger la fin de son mandat et les projets électoraux de sa famille politique qui serait beaucoup plus confortable si c’est lui qui organise les prochaines élections. Sa nervosité qu’un rien ne soulève le peuple n’est pas feinte. Il a raison de croire que la page de nouvelles convulsions politiques n’est pas tournée. Reste la question incontournable.  Comment avancer vers la résolution de la crise institutionnelle avec un président Moïse handicapé par la méfiance et ses envies ? La réponse à cette question pourrait bien provoquer des « machwè gonfle ». Cependant le président Moïse gagnerait à faire partie de la solution. Et faire mentir ceux qui, en 2019, ont soutenu qu’il fait partie du problème après avoir fait la radiographie de son déficit de leadership…