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Le Nouvelliste

Marche contre le silence autour des violences faites aux filles et aux femmes

Dec. 3, 2019, midnight

« Les victimes de violence de genre ont un sexe : celui attribué à tout être humain né avec un vagin, le sexe féminin.  Peu importe la catégorie socioprofessionnelle considérée. Dès que le sexe se définit féminin, il est à risque d’être victime de violence sexuelle, de viol, d’agression, d’abus, de harcèlement sexuel », a déclaré la fondatrice de la Fondation Toya, Nadine Louis Similien, le samedi 30 novembre, au cours d’une marche symbolique organisée par les filles et les jeunes femmes leaders Toya.  Cette marche réalisée pour dénoncer le silence complice de l’État et toutes les autres composantes de la société civile s’est articulée autour du slogan « Pa fè kòm si w pa wè ! » Au parc Ste-Thérèse de Pétion-Ville, où la marche a démarré vers les 10 h a.m, une atmosphère revendicative régnait dans l’enceinte sportive. Les filles et les femmes scandaient : « Nous les filles d’Haïti, nous avons décidé de marcher pour dire à la société d’arrêter de faire semblant de ne rien voir. » L’innocence volée Arborant un maillot à l’effigie de l’organisation YWCA, une adolescente s’époumonait : « Notre jeune âge ne nous empêche pas de comprendre qu’un avenir sombre nous attend si rien n’est fait pour changer la situation de violence dans laquelle on a grandi. La violence a déjà volé l’innocence de tant d’adolescentes d’entre nous. »  La marche, qui a réuni plusieurs centaines de personnes, a longé la rue Aubrant pour s’enfler à l’avenue Panaméricaine où d’autres organisations attendaient : SOFA, Nègès Mawon, YWCA, AFHEM, IJ-Haïti, CECI-Haïti, Facdis, entre autres. Les membres de ces organisations interpellaient la justice comme service public pour punir les agresseurs. Pour signaler désormais que l’État doit être du côté des victimes. Au carrefour de Musseau, Bourdon, où la marche a été clôturée, Mathania, une jeune Toya leader, arborait l’uniforme d’un agent du CIMO. Par cette tenue, elle voulait signifier que les policières ne sont pas épargnées par les prédateurs sexuels. Elle a formulé une demande claire : l’application du décret du 6 juillet 2015 qui criminalise le viol et le respect des différentes conventions internationales signées par l’État haïtien. Les conventions sur l’élimination de toutes les formes de discriminations et de violences contre les femmes, notamment les conventions de CEDAW et de Belém do Pará.   La directrice de la Fondation TOYA, vêtue en uniforme scolaire, coiffure nouée de rubans, a exhorté les acteurs clés du gouvernement et de la société civile à faire échec à l’impunité qui rythme notre corps social. Elle a déclaré avec une haute et intelligible voix : « Nou pa ka kontinye ap fè kòmsi nou pa wè tifi k ap sibi vyolans anba men moun ki ta sipoze proteje yo. » Nadine Louis Similien a mis en garde cette société indifférente dont le silence rend coupable et renforce l’impunité. La marche de la Fondation Toya, organisée dans le cadre des 16 jours d’activisme qui couvrent la période du 25 novembre au 10 décembre, s’est révélée originale. Pour attirer l’attention de la population, les jeunes filles de la Fondation se sont vêtues d’uniformes et d’habits mettant en évidence différentes catégories socioprofessionnelles.