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Le Nouvelliste

La justice est saisie du dossier du sénateur Jean-Marie Ralph Féthière

Sept. 26, 2019, midnight

Le parquet de Port-au-Prince est saisi du dossier du sénateur Jean-Marie Ralph Féthière qui, lundi, au Parlement, a ouvert le feu pour inciter des militants qui «l’agressaient» à se déguerpir. Des projectiles ont atteint le photojournaliste Dieu-Nalio Chéry et d’autres personnes. Différentes associations de professionnels de la presse n’ont pas tardé à réagir pour réclamer justice pour leur confrère qui a reçu une balle à la mâchoire et frôlé la mort. Certains vont jusqu’à enjoindre l’arrestation de l’élu du Nord qui a commis son acte au vu et au su de tous.Aux termes de l’article 115 de la Constitution, « en cas de flagrant délit pour des faits emportant une peine afflictive et infamante », un parlementaire peut être arrêté au cours de son mandat. Joint par le journal, le commissaire du gouvernement, qui était en voyage lundi, a d’entrée de jeu précisé qu’en matière de flagrant délit et de clameur publique, n’importe quel citoyen peut procéder à l’arrestation de n’importe qui. L’immunité parlementaire ne tient plus dans ce cas d’espèce, a-t-il rappelé.« Le commissaire du gouvernement n’est pas obligé d’être sur place. N’importe quel officier de la police judiciaire pourrait procéder à une arrestation », a fait savoir Paul Eronce Villard. Après cette arrestation, il reviendrait aux autorités judiciaires de se prononcer sur la culpabilité de l’accusé. Cependant, le flagrant délit s’éteint dans les 48 heures qui suivent l’action. Dans ce cas-là, analyse Paul Eronce Villard, nous ne sommes plus dans le cadre de la flagrance. Cela n’empêche pas pour autant de mettre l’action publique en mouvement, a nuancé l’homme de loi.« Toute les dispositions sont déjà prises afin mettre en mouvement l’action publique dans le cadre de ce dossier et contre toutes les exactions survenues au cours de cette période. Mais, de l’action publique ne se découle pas toujours une arrestation. On peut mener une enquête afin de permettre à la justice de condamner l’accusé s’il s’avère être coupable », a-t-il expliqué, avant de souligner que le commissaire du gouvernement, étant le chef incontesté de l’action publique, peut analyser la légalité et l’opportunité des poursuites.Dans l’affaire concernant le sénateur Jean-Marie Ralph Féthière, le commissaire du gouvernement estime que les deux cas y sont présents : la légalité et l’opportunité. « Il y’a une panoplie d’actes que la loi met à votre disposition pour poursuivre la personne. Si la clameur publique dit qu’il y’a tentative d’assassinat, l’instruction est obligatoire. Pour cela, il faut des témoignages et des rapports soit d’officiers de la police ou d’autres instances judiciaires », a-t-il déclaré. Me Villard a souligné que le parquet a déjà discuté avec la Direction centrale de la police judiciaire. « Dès demain (jeudi), deux rapports devront nous être parvenus », a confié le chef du parquet.Des témoins, des rapports des agents de police sur place ou des procès-verbaux d’un juge de paix, les déclarations ou plaintes des victimes sont entre autres éléments nécessaires pour permettre au parquet de monter un dossier. « Nous ferons tout ce qui est légal dans ce dossier pour mettre l’action publique en mouvement », a une fois de plus réitéré le commissaire du gouvernement, qui participait lundi à la 173e conférence de la Commission interaméricaine des droits de l’homme.Sur les ondes d’une station de radio, le sénateur du Nord, pour se défendre, a évoqué la légitime défense et, son bureau, dans une « note de presse » non datée, a « condamné l’incident ». Dans le cadre de la légitime défense, Paul Eronce Villard souligne que la réaction doit être proportionnelle à l’action. Sinon, il peut s’agir d’une excuse légale de provocation. Cette excuse est une réaction violente suite à une agression verbale ou physique que subit une personne. Il peut être également une tentative d’assassinat. Mais, ne cesse-t-il de préciser, il ne revient pas à un justiciable de qualifier la nature de son action ou de décider de son sort.Aucun plaignant n’a encore déposé de plaintes au parquet de Port-au-Prince ou par devant une autre juridiction du pays. Des organisations de la société civile continuent d’exiger justice pour le célèbre photojournaliste Dieu-Nalio Chéry. Reste à savoir la suite de l’enquête du parquet près le tribunal de première instance de Port-au-Prince. L’on se demande déjà si le ministère de la Justice demandera de lever l’immunité du sénateur ou si ses pairs accepteront de le faire, au cas où la balance serait penchée en faveur des victimes qui ont été blessés par balles lundi au Parlement ?