Le Nouvelliste
Covid-19 : les médecins résidents exigent des équipements de protection
April 3, 2020, midnight
« On nous a dit qu’il y a du matériel mais nous ne le voyons pas encore », a confié non sans inquiétude le Dr Patrick André, résident 2 en médecine interne à l’Hôpital universitaire Justinien du Cap-Haïtien (département du Nord). Ce médecin et ses collègues résidents sont prêts à faire front commun pour aider les patients contaminés par le virus. À l’hôpital universitaire Justinien, affirme-t-il, ils sont « hyper motivés », mais l’absence de moyens de protection peut refroidir leur dévouement. « Jusqu’à présent, il y a des promesses. Le directeur de l’hôpital nous a assuré que des équipements sont disponibles tels que gants, blouses, cache-nez, ventilateurs mécaniques et moniteurs. On nous dit aussi qu’il y a des masques mais en petite quantité. On nous demande d’en faire un usage rationnel », a expliqué le médecin qui dit constater que l’hôpital se prépare à accueillir les patients frappés par l’épidémie. L’espace qui a été réservé au traitement du choléra accueillera les patients avec le Covid-19. Il dispose de 14 lits. Entre autres actions, des séances de formation au profit du personnel de santé ont été réalisées, des seaux d’eau sont installés à chaque coin de l’hôpital et les patients hospitalisés sont renvoyés chez eux. Qualifiant d'insuffisantes les actions posées par les autorités sanitaires pour équiper et surtout pour créer les meilleures conditions de travail pour les professionnels de santé, le Dr Doloreste Lajoie, résident à l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti, recommande à l’Etat une meilleure organisation et gestion de la crise. Car, dit-il, la planification contre le Covid-19 ne suit pas un plan bien défini. Il estime que les autorités copient mal ce qui se fait dans les pays étrangers en faisant fi de la réalité d'Haïti. le Dr Lajoie fait savoir que les médecins ne pourront pas faire face à cette menace et sauver la vie des patients si certaines conditions ne sont pas réunies. Il fait remarquer que les équipements distribués au personnel de santé ne sont pas appropriés. Pour les médecins résidents, le Covid-19 est un ennemi bien armé qu’ils ne veulent pas attaquer sans armes. « Si c’est avec les équipements qu’on va combattre le coronavirus, on sera tous morts. Pour instant, ce que je vois à l’hôpital, c’est qu’on apporte du matériel de protection qui n'est pas de bonne qualité. Il y a certaines blouses, pas en quantité », a-t-il expliqué en interview avec le journal le vendredi 3 avril. Les médecins résidents exigent que l’État mette à la disposition des professionnels de santé des moyens de transport, une cafétéria et de réaménager la résidence afin qu’elle puisse respecter les mesures de protection. « L’eau doit être en permanence disponible à l’hôpital. Nous avons aussi besoin d'une cafétéria car on risque de contaminer les gens en allant acheter à manger ailleurs dans la mesure où l'on aurait attrapé le virus à l’hôpital ou d’être contaminé en allant acheter à manger pour ensuite transmettre aux patients le virus », a expliqué le médecin. Quant au Dr Pharol Alnord, résident 2 en orthopédie à l’hôpital universitaire La Paix, il conseille au ministère de la Santé publique et de la Population d’aménager une salle de triage dans les hôpitaux afin de diminuer le risque de contamination du virus. Les personnes avec symptôme grippal devront être reçues dans un lieu à part. « Il faut une préparation logistique dans les hôpitaux, des formations pour le personnel de soutien et il faut aussi que le triage soit fait différemment pour ne pas contaminer tous les gens » a-t-il recommandé, soulignant qu’à l’hôpital La Paix, la préparation au Covid-19 se fait timidement. En petite quantité, des équipements de protection ont été distribués à la direction de l’hôpital. Comme ses collègues médecins résidents, le Dr Vilson Bonhomme, de la Maternité Isaïe Jeanty, se dit prêt à s’embarquer dans la lutte contre le Covid-19. « Malgré les mauvaises conditions de travail, on reste toujours au chevet des patients », a-t-il indiqué, réclamant des équipements de protection, des moyens de transport et une cafétéria.