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Le Nouvelliste

La BRH parie sur la capacité de la gourde digitale d’inclure financièrement tous les Haïtiens

May 12, 2020, midnight

D’après l’enquête FINSCOPE menée en 2018, 46% des adultes de 15 ans et plus en Haïti sont exclus financièrement, avec seulement 11% de cette population qui est bancarisée. Pour inverser la tendance, c’est-à-dire pour inclure le plus de monde possible, – pourquoi pas la population haïtienne d’une manière générale ? – Jean-Baden Dubois, gouverneur de la Banque de la République d’Haïti (BRH), parie sur la gourde digitale. « Nous voulons que chaque Haïtien puisse être inclus financièrement, c’est le premier objectif », a soutenu le gouverneur de la banque centrale lors d’une présentation faite le 30 avril 2020 à la 5e édition du Sommet de la FinTech. Quelqu’un avec du cash de nos jours n’est pas forcément inclus financièrement, a reconnu Jean Baden Dubois, tandis qu’avec de la monnaie digitale, a-t-il poursuivi, il sera automatiquement inclus dans le système financier parce qu’il pourra faire des transactions, économiser, avoir des intérêts sur son argent. Le deuxième objectif de l’orientation de la BRH vers cette solution technologique est d’ordre économique. « Le coût de fabrication des billets est extrêmement important », a révélé le gouverneur, ajoutant que l’émission de chaque billet coûte à l’État haïtien, par l’intermédiaire de la banque centrale, entre 7 et 14 centimes, alors que la monnaie digitale ne coûte rien. À en croire Jean-Baden Dubois, la création de la gourde digitale se fera à partir d’un coffre numérique se trouvant à la banque centrale et servira à transférer cette monnaie de manière électronique à différents porte-monnaie. La gourde digitale permet de moderniser le système de paiement, a poursuivi le gouverneur, puisqu’elle est appelée à remplir le même rôle que la monnaie fiduciaire. Elle peut en outre optimiser les transactions en ce sens qu’elle permet à quiconque, peut importe l’endroit où il se trouve, d'effectuer des transactions. Et comme troisième et dernière raison à la volonté de la BRH d’émettre sa propre monnaie digitale, Jean-Baden Dubois a évoqué l’engouement manifeste des FinTech à travers le monde pour ce secteur, chasse gardée des banques centrales. « Dans le monde entier, soutient Baden, les banques centrales se sont mises à s’intéresser à la monnaie digitale parce que les FinTech ont voulu remplir le rôle de ces institutions. On s’est rendu compte que si les banques centrales n’émettent pas leur propre monnaie digitale, l’espace va être comblé par les FinTech et ces dernières ne sont pas forcément sous la régulation d’une banque centrale. »  Par ailleurs, dans le contexte Covid-19, à côté de la distanciation sociale, éviter la propagation des microbes, du virus, est une des mesures de prévention. La monnaie en changeant de main est un vecteur de transmission du virus d’une personne à une autre. « Si l'on avait déjà la gourde digitale, ce serait un souci en moins pour nous dans le pays », a affirmé le gouverneur Dubois. S’agissant du choix de l’infrastructure technologique de la monnaie digitale à venir, il doit garantir l’ensemble des exigences suivantes : résistance et durabilité, sécurité, évolutivité, confidentialité, interopérabilité, accessibilité. « On va introduire l’anonymat pour des petits montants mais pas pour les gros montants », a assuré le numéro un de la BRH, garantissant l’interopérabilité de la gourde digitale avec les FinTech, plusieurs institutions ou des entités (Unibank Tout Kote, SogeIzi, MonCash, Lajan cash, etc.) qui font partie du système de paiement national.   Plus loin, Jean-Baden Dubois a indiqué que le cadre légal devant accompagner la gourde digitale sur les fonts baptismaux existe mais avec beaucoup de limites. « Il va falloir réviser certains de ces textes de loi […]  Il va falloir […] que dans la Constitution soit clairement dit la monnaie digitale a cours légal en Haïti », a recommandé le gouverneur, soulignant que la direction juridique de la BRH est en train de revoir la circulaire relative à la banque à distance et de préparer une loi sur les systèmes de paiement en Haïti.  « Nous sommes actuellement à la dernière phase relative à la mise en place d’une phase pilote […] Les banques commerciales vont devoir évoluer. Certaines fonctions de banque vont rester intactes comme celle de distribuer du crédit. Les banques vont rester nos partenaires, probablement pas les seules car nous allons avoir les FinTech qui vont devenir aussi des partenaires », a déclaré Jean-Baden Dubois, annonçant l’organisation d’un concours national sur le meilleur nom de cette monnaie digitale.