Le Nouvelliste
Les responsables de l’hôpital général crient à l'aide
Sept. 19, 2019, midnight
« La situation ne peut plus continuer ainsi, nous allons tous périr. Il faut redresser la barre au plus vite », tel est le cri de la directrice exécutive de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HEUH), le Dr Jessy Colimon Adrien, martelant que la situation devient intenable. « Trop de stress à vivre au quotidien. Trop de frustrations », balance-t-elle, expliquant que la rareté de carburant a de graves conséquences sur le fonctionnement de l’hôpital de référence du pays dont les réserves de carburant sont à sec. Le Dr Jessy Colimon Adrien se dit paniquée. Elle a dû mal à s’approvisionner en oxygène, un des intrants indispensables dans un hôpital. « Si le véhicule de l'HUEH n'a pas de carburant, on ne pourra pas aller faire remplir les bonbonnes d'oxygène. La prise en charge des patients en détresse vitale sera compromise. Les génératrices doivent disposer assez de carburants pour faire fonctionner les blocs opératoires », explique la pédiatre, faisant remarquer que les ambulances continuent d'arriver à l’hôpital avec les patients blessés et les femmes en travail sur le point d'accoucher. « Nous devons les prendre en charge »,précise-t-elle. Déjà trois semaines depuis que le Dr Adrien peine à trouver les deux bouts pour faire fonctionner le plus grand centre hospitalier du pays qui croule sous des d'immondices en raison du fait que le Service métropolitain de collecte et de résidus solides (SMCRS) ne peut venir collecter les déchets. L’hôpital fait également face à un problème de rareté d’eau. La Direction nationale d’eau potable (DINEPA) ne livre pas d'eau, car les camions sont absents. Les difficultés sont nombreuses, souligne la directrice exécutive de l’HUEH qui s’est confiée au Nouvelliste au cours d’un entretien accordé le mardi 17 septembre. Pédiatre de carrière, professeur à la Faculté de médecine et de pharmacie, le Dr Jessy Colimon Adrien affirme être « très déçue de voir se dégrader la situation du pays, de voir que les décideurs publics et privés ne peuvent gérer leurs différends». « Je demanderais aux responsables d’être plus attentifs aux besoins de cette population, notamment en matière de santé. Certains centres hospitaliers comme toute entreprise ordinaire ont du mal à faire fonctionner leur génératrice, faute de trouver du carburant. Aucune mesure particulière n’a été prise pour leur rendre la tâche plus facile. J’ajouterai qu’il est temps que la santé ne soit plus une priorité seulement sur les papiers ou dans les spots publicitaires mais que des actes concrets puissent le prouver », a, pour sa part, a confié le chef de service des urgences de l’HUEH, le Dr Préden Morinvil. Depuis le début de la construction du futur local de l’HUEH en 2013, les conditions de fonctionnement au sein de la structure de transition ont toujours été un vrai casse-tête. Plusieurs services ont été réduits de leur capacité. Les problèmes de parking, de drainage des eaux usées notamment en période pluvieuse sont autant de facteurs qui n’ont jamais cessé de rendre difficile notre travail. Viennent s’ajouter à tout cela, la rareté de carburant et les troubles politiques. Une grande partie du personnel habite dans des zones assez éloignées de l’hôpital et a des difficultés de se présenter à leur poste. « On travaille donc en effectif réduit. Point besoin de dire que tout cela affecte la qualité des soins des patients. On essaie toutefois avec l’aide du Centre ambulancier national (CAN) de récupérer l’essentiel du staff », a expliqué le Dr Préden Morinvil. En ces temps de crise, certains médecins ont dû travailler pendant plus de 48 heures sans pouvoir se ravitailler ni regagner leur domicile. « J'en profite pour remercier vivement les médecins et les infirmières et les agents d'entretien, bien entendu ceux qui continuent de se dévouer pour prendre en charge les patients. En tant que médecin, nous devons continuer à servir valablement la population », a déclaré le Dr Jessy Colimon Adrien qui attend que la situation s’améliore.