this used to be photo

Le Nouvelliste

Santé et "peyi lòk": le MSPP fait le point

Oct. 14, 2019, midnight

Le directeur général du ministère de la Santé publique et de la Population (MSPP), le Dr Lauré Adrien, à défaut de dresser un bilan, a fait le point sur l'état du système de santé durant ce moment particulièrement difficile. L'hôpital général fonctionne sans les prestataires de soins depuis tantôt une semaine. La faute à un malentendu autour de la mort de Maxo Pierre, un adolescent de 16 ans blessé par balle lors d'une manifestation à Delmas 60. Le directeur général estime qu'aujourd'hui le personnel administratif et les prestataires de soins ont une réticence légitime à venir travailler. "Quand on envoie attaquer des professionnels travaillant dans un hôpital, cela donne quoi comme résultat ? Ceux qui étaient sur place veulent partir et ceux qui ne sont pas là ne veulent pas venir". Le MSPP, poursuit le Dr Lauré Adrien dans une entrevue exclusive accordée au Nouvelliste, ne peut pas gérer l'opinion publique en même temps qu'il essaie d'acheminer des intrants dans les hôpitaux qui en ont besoin. "A chacun sa responsabilité ; nous sommes là pour donner des soins. Nous ne pouvons pas consacrer notre temps et notre énergie à démentir des choses qu'on voudrait faire croire à  l'opinion publique au détriment de ceux qui sacrifient leur vie pour donner des soin". Le directeur général du MSPP explique qu'il en est de même pour la situation qui s'est déroulée aux Cayes durant la période de peyi lòc où des patients et des professionnels de santé ont été agressés. A entendre le Dr Lauré Adrien ces situations n'aident pas le ministère dans l'accomplissement des tâches qui sont les siennes. L'état des lieux dans les hôpitaux  Le pays est en plein mouvement lòk et tout le bilan partiel risque de ne pas refléter la réalité puisqu'en matière de santé certains dégâts se font sentir sur la longue durée. Cependant, nul doute que la mortalité augmente de manière générale, soit parce que certains intrants ne sont pas disponibles, soit parce que les gens ne peuvent même pas arriver à l'hôpital.  En attendant un rapport détaillé, les hôpitaux ont, entre autres, des problèmes de carburant, d'oxygène, d'intrants et de médicaments. Pour le carburant, la direction générale du MSPP avoue avoir fait des efforts énormes pour en distribuer dans les hôpitaux. « Que cela soit clair, cela n'a jamais été le rôle du ministère de la Santé publique et de la Population. On joue ce rôle parce que la situation du pays ne permet pas aux hôpitaux de s'approvisionner en intrants », avance la direction générale du MSPP. Les responsables font également remarquer que le MSPP rencontre les mêmes difficultés que tout le monde. "Le carburant est disponible, mais impossible de l'acheminer à Jérémie : les routes sont bloquées ; un camion en direction de Jacmel est bloqué depuis 4 jours. On ne peut pas transporter du carburant quand on sait qu'on va traverser 4 barricades enflammées", se désolent les tenants du MSPP. Pour l'oxygène, même si le problème n'est pas complètement résolu, le MSPP, de concert avec des partenaires internationaux a trouvé des bonbonnes d'oxygène pour aider les hôpitaux à tenir le coup. « On a un fournisseur dans l'aire métropolitaine, il suffit que l'hôpital apporte une bonbonne d'oxygène vide pour que le fournisseur la remplisse. Là encore, certains hôpitaux ont dû faire face à des barricades à chaque carrefour ». Les intrants et les médicaments sont aussi distribués en douceur, à la cloche de bois, dans une trentaine d'hôpitaux prioritaires du pays. Sur ce point le directeur général du MSPP est catégorique. « On ne va pas se mentir, ce n'est pas parce qu'il y a une situation exceptionnelle que le ministère va pouvoir résoudre des problèmes qu'il avait du mal à résoudre en temps normal. Au contraire, ça va casser l'élan du MSPP et nous laisser avec des problèmes à long terme liés aux problèmes structurels en souffrance dans le ministère », souligne le Dr Lauré Adrien, obstétricien-gynécologue de carrière.  Des faits divers à gérer  Le directeur général du MSPP a exprimé son inquiétude également par rapport à des petits problèmes qui empêchent le ministère de faire son travail correctement.  D'abord, il dénonce encore une fois les attaques contre les ambulances. « Quand il y a un tel précédent, les gens ne veulent pas venir travailler par peur de risquer leur vie. Il y a tellement de difficultés à trouver des ambulances, les démolir à coups de pierres envoie un mauvais signal aux donateurs ». Plus loin, les responsables du ministère assurent avoir accompagné quelques structures privées à la hauteur de leurs moyens. Notamment, les hôpitaux OFATMA, Bernard Mevs, etc. Quant à la reprise des activités à l'hôpital général, le directeur se montre dubitatif par rapport à un retour à la normale. Il pense que la question de la sécurité du personnel administratif et des professionnels de santé doit être adressée en profondeur et que chacun assume sa responsabilité. «L'effectif de la police n'est pas élastique par rapport aux problèmes. La police est demandée partout, il sera difficile de faire installer un camion de policiers à l'entrée de l'hôpital général. Il faut des solutions plus solides qui exigent de tous les acteurs un sens des responsabilités afin de ne pas faire payer la population qu'on dit vouloir aider.