this used to be photo

Le Nouvelliste

La pandémie des faux pasteurs…

May 26, 2020, midnight

L’humanité a toujours produit du bien et du mal ; des voyous ; des arnaqueurs ; des hommes et des femmes nourris de bonnes intentions, lesquelles, face à la désobéissance du réel, ont donné lieu à des catastrophes. Et cela ne risque pas de changer de sitôt. Honneur à celles et ceux qui n’ont pas prétendu que leurs erreurs, leurs crimes, leurs mensonges obéissaient à la volonté d’une divinité, parfois de plusieurs, leur ayant fait des confidences et les ayant choisis pour attachés de presse et commis-voyageurs. Inventer les dieux, c’est une chose avec laquelle on peut faire la paix. Les avilir en est une autre avec laquelle il est plus difficile de pactiser. La pandémie des faux pasteurs a des conséquences bien réelles sur les conditions de vie des humains. C’est un mal terrestre qui a conforté ce que les humains ont fait de pire : le racisme, l’exploitation, l’obscurantisme, le sexisme… Ici, ils frappent fort. Tel jouant au nouveau messie, connaissant à peine l’abc de la théologie de la libération et se révélant au fil des ans d’un cynisme n’ayant d’égal que l’appétit de pouvoir. Tel, connu pour ses préjugés de classe et de couleur, qui ne rate pas une occasion d’étaler son conversatisme, son aliénation de petit nègre pro-américain, qui fait penser aux vers d’Emile Roumer dans un sonnet de son « Caïman étoilé » : « Vous emmerdez le monde avec God sur la bouche / Dites simplement « gold » et l’on vous comprendra ». Tels, connus et moins connus, qui vendent de l’obscurantisme au nom de Yahvé, des loas, qui ont les remèdes à toutes les maladies, les solutions à tous les problèmes, une prière anti-sida, une autre anti-Covid-19, et surtout un compte sur lequel envoyer vos dons. Tels coupables d’abus sexuels dans presbytères et houmforts… Tel dont on dit - ce ne serait pas sa seule vertu - qu’il attirait l’attention de la dictature sur les « communistes » dans les mouvements de jeunes. Tels qui vendent de la désocialisation, de l’antisolidaire : tous sont vos ennemis, ceux qui appartiennent à la même classe que vous, vos proches ; vous n’avez que deux amis, moi et le Dieu au nom duquel je vous parle. Tels qui vendent de la résignation : ne vous mêlez pas de politique, les choses terrestres sont ce qu’elles sont ; souffrez, laissez-vous faire. Dieu n’aime que les moutons pelés ; plus vous vous faites tondre, plus vous serez aimés plus tard, ailleurs… Tels qui vendent de l’archaïsme : le pouvoir du mâle, le rejet de la liberté individuelle et du libre arbitre. Pandémie des faux pasteurs, et les pauvres dieux mal servis par ceux qui servent au fond intérêts de classe et d’oligarchie et intérêts personnels. Pour les dieux, être si mal servis c’est plus une affaire de prestige, puisque, sauf exception par voie d’humanisation, ils n’en souffrent pas dans leur chair. Mais pour les humains, les conséquences sont palpables : pouvoirs corrompus, conditions de vie désastreuses, maintien délibéré dans l’ignorance. Parmi les victimes, les femmes et les hommes de tous les cultes du monde qui veulent associer leurs croyances à des pratiques humanistes, allant dans le sens du progrès humain dans l’égalité qui fait la liberté. Je les plains, victimes qu’ils sont du discrédit que jette sur leur foi l’existence de tels confrères.