Le Nouvelliste
On ne peut dédier des sièges aux femmes sans un amendement ou une réforme constitutionnelle, selon Abdonel Doudou
March 10, 2020, midnight
Conduisant seul la barque du pays sans un Parlement, le président de la République Jovenel Moïse veut profiter du boulevard qu’il a devant lui. Lors de la troisième édition du dialogue communautaire tenue en présence de femmes de plusieurs catégories sociales le 8 mars dernier, le chef de l’État a dévoilé son « rêve » : celui d’adopter une loi électorale dans laquelle il prévoit de dédier trente-cinq circonscriptions exclusivement à des candidates. Une déclaration qui ne surprend pas le responsable de Jurimedia Abdonel Doudou. « Les déclarations du président ne m’étonnent pas. Le chef de l’État est resté égal à lui-même. Il a fini par nous habituer à ces promesses, à ces paroles faciles », rétorque Abdonel Doudou. Ce dernier inscrit les déclarations du chef de l’État dans une stratégie électoraliste. « Quand ils arrivent à des dates emblématiques, les hommes politiques, d’une manière générale, aiment faire des annonces qui peuvent leur rapporter des dividendes politiques », fait-il remarquer. Le président, a-t-il mesuré toutes les implications de ses déclarations, se demande Abdonel Doudou. Le responsable du Jurimedia a toujours plaidé en faveur de l’application du quota 30% et d’un quota pour nos compatriotes de la diaspora qui doivent être représentés dans les postes politiques. Selon lui, la représentation politique n’est ni « rationnelle ni équilibrée ». M. Doudou estime cependant que ce que souhaite le président n’est pas aussi simple qu’il le pense. « On ne peut pas, sans un amendement ou une réforme constitutionnelle, dédier des sièges au Sénat et à la Chambre des députés aux femmes ». Adopter une loi qui dédie des circonscriptions aux femmes, même dans un contexte où il y aurait un Parlement en place, affecterait la Constitution, martèle Abdonel Doudou. Il faut une révision de la cartographie électorale. Ce qui implique, selon lui, des interventions au niveau de la loi et de la Constitution. L’article 153 du projet de loi qui a été présenté au Parlement par le Conseil électoral provisoire prévoit un mécanisme qui vise à encourager les partis politiques à présenter des femmes candidates aux élections. Le président peut poursuivre dans cette voie. « Il peut faire en sorte que soient introduites dans la loi des dispositions visant à encourager les partis politiques à recruter plus de femmes et présenter la candidature au moins d’une femme dans chaque circonscription », conseille-t-il. Là encore, ce n’est pas une garantie que le quota 30% sera respecté. « Même les électrices ne se fient pas au potentiel des femmes », lâche Abdonel Doudou. Il pense qu’un travail doit être fait dans les mentalités.