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Le Nouvelliste

Chez le voisin…

Dec. 13, 2019, midnight

D’énormes bouchons se forment sur les principales artères de Santo Domingo. Du moins, aux heures de pointe. Mais contrairement à Port-au-Prince, aucun véhicule roulant à contresens, officiel ou pas, ne vient compliquer davantage la situation. Pas de piétons sur la chaussée, aucun marchand n’obstrue les trottoirs obligeant ceux qui les empruntent à déborder la chaussée. Il n'y a pas l’ombre non plus d’un motocycliste endiablé serpentant entre les voitures. Un minimum de discipline fait un maximum de différence. Les rues sont gardées propres. Pas de fourmilière de tap-taps, sinon des autobus et des taxis. Toutefois, comme en Haïti, des véhicules fabriqués à une autre époque, sauvagement fatigués, sont remarqués.   La ville bouge. Les activités tournent à plein régime. On a l’impression que tout le monde circule en voiture. En 2016 déjà, le parc automobile de la République dominicaine était de plus de 3,5 millions de véhicules. La majorité des grandes marques sont présentes. Des voitures de luxe sont exposées un peu partout. Johnny, notre chauffeur-guide, est venu nous chercher à l’aéroport régional La Isabella. Cet aéroport n’a rien à envier à certains aéroports internationaux de la Caraïbe. Sur la route, qui conduit à l’hôtel, un sentiment de révolte anime les passagers, des étudiants en MBA à l’UNDH ainsi que des responsables du programme. Dans le cadre d’une mobilité universitaire, ils sont venus visiter le fonctionnement de certaines institutions à Santo Domingo, puis à Ponce et à San Juan (Porto Rico). Avant même les visites, la différence entre les deux pays partageant l’île en termes d’infrastructures saute aux yeux. Des « hmmm ! » pour étouffer les frustrations.  Les Dominicains ont peut-être raison de se vanter de posséder l’infrastructure routière la plus moderne des Caraïbes. Des autoroutes qui desservent leurs principales destinations touristiques. On n’est pas là pour faire du tourisme, on n’aura pas le temps d’explorer les zones touristiques populaires de Punta Cana, de La Romana, de Bávaro… On se contentera d’un tour dans la ville, visiter la Zona Colonial où l’architecture de certains bâtiments rappelle une tranche de l’histoire coloniale.   Le rendez-vous du jour est à la Chambre de commerce et de production. Elle est logée dans un immeuble d’une dizaine d’étages. Les gens, employés ou visiteurs, y défilent à longueur de journée. Pour la plupart, ils suivent le processus de création de leur entreprise ! Une section constituée de consultants en administration des affaires est disponible pour fournir gratuitement des conseils. En 24 heures seulement, quelqu’un peut enregistrer une entreprise. Avant, ça prenait cinq jours. « Sans l’accompagnement de la Chambre de commerce et de production, il faut 20 jours », souligne un responsable. Pour rendre ce travail efficace, plus de 130 personnes, dont une trentaine d’avocats, s’y adonnent. 32 avocats analysent les transactions (si l’entreprise est en règle avec la loi), effectuent les contrôles de qualité, entre autres. Plusieurs dizaines de nouvelles entreprises apparaissent quotidiennement. Pour la Chambre de commerce, dotée d’une superbe salle de conférence, d’outils de travail modernes, ce sont les entreprises qui créent les emplois. « 9 000 entreprises ont été enregistrées cette année », confie Farah de La Mota du service de communication et de marketing de la Chambre. Jusque-là, la Chambre de commerce remplit très bien sa mission : être la principale entité en République dominicaine qui promeut le commerce formel à l'appui de la croissance économique, du développement national, de la création d'emplois et du renforcement institutionnel. La soirée s’achève par une tournée dans la ville encore encombrée. Des rues piétonnes, ça existe. A la Zona Colonial. Ce quartier est en quelque sorte un pan de la mémoire du pays avec l’architecture des bâtiments et autres monuments historiques. On emprunte l’avenue George Washington (avenue Malecón) qui donne le jour à une vue imprenable sur la mer. L’avenue Malecón est construite à partir du grand Bicentenaire d'Haïti où se promenaient des touristes. Une toute autre époque. Avant d’être pris d’assaut par des bandits armés, l’Etat haïtien l’avait déjà abandonné et c’est aujourd’hui une des zones les plus insalubres du pays. A l’avenue Malecón, à la place d’un marché public ou un bidonville insalubre, on a construit de grands hôtels. Ce soir-là, des gens se détendent dans des hamacs au bord de la mer, d’autres s’embrassent, font du sport, se baladent en carrosse. « Nous avons eu toutes ces choses avant eux. Nous avons détruit les nôtres… », soupire le Dr Paul Latortue, avec un brin de révolte dans le ton. En Haïti, tout ça se conjugue au passé... ou au futur... Mais bon…