Le Nouvelliste
L’importance du tribunal de paix
Feb. 10, 2021, midnight
Le tribunal de paix est avant tout un tribunal de proximité en raison du fait qu’il est beaucoup plus accessible à la population, c’est-à dire qu’il existe dans les coins les plus reculés du pays, au point où certaines communes disposent de plus de deux tribunaux de paix comme c’est le cas de la commune de Port-au-Prince où il y a trois tribunaux de paix. On compte la section Sud, la section Nord et la section Est. Le juge de paix, au regard de la loi, est un juge conciliateur. Il doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour porter les gens à résoudre leurs différends à l’amiable. Ne dit-on pas qu’un mauvais arrangement vaut mieux qu’un grand procès ? Selon un juriste ayant requis l’anonymat, il y a trois textes faisant du juge de paix un juge conciliateur. Ce sont les articles 1er et 60 du code de procédure civile et l'article 91 du décret du 22 août 1995 relatif à l’organisation judiciaire. Toujours dans sa juridiction gracieuse, le juge de paix peut siéger tous les jours chez lui, même les dimanches et les jours fériés. Nous disons qu’il peut siéger chez lui en tant que père de famille. La loi lui fait seulement obligation de laisser ouvertes les portes de la maison exception, faite pour les affaires pénales. Cela peut bien se comprendre car le juge de paix ne dispose pas de garde à vue chez lui. Attributions juridictionnelles En matière civile, le juge de paix entend des affaires de moindre importance. Ses attributions sont limitativement énumérées par l’article 84 du décret du 22 août 1995 relatif à l’organisation judiciaire. En dernier ressort (cassation), il connait de toutes les affaires civiles, commerciales, personnelles dont la valeur n’excède pas la somme de 5000 gourdes. En premier ressort, à charge d’appel, le juge de paix peut trancher toutes les affaires civiles, commerciales, personnelles dont le montant n’excède pas la somme de 25 000 gourdes. Il connait en premier ressort les affaires de loyers, de déplacement de bornes, les actions possessoires et des actions en validité de congé de location. Il faut préciser que les actions possessoires et en validité de congé de location sont de la compétence exclusive du juge de paix. Les actions possessoires sont la complainte, la dénonciation de nouvel œuvre et la réintégration. Notons que la propriété doit être détachée de la possession. Car le droit de propriété est le droit le plus complet que l’on puisse exercer sur une chose : 1o) l’usus, c’est-à-dire le droit de jouir du bien ; 2o) le fructus, le droit d’en tirer des fruits ; 3o) l’abusus, c’est-à-dire le droit d’en disposer, de vendre le bien. Alors que la possession est un état de fait résultant d’actes matériels de jouissance. Dans ce cas, on peut dire que le possesseur manifeste l’intention de garder la chose comme sienne. Bien qu’il ne soit pas propriétaire, il agit comme s’il était le véritable propriétaire du bien et pose des actes de maître. La loi met à la disposition de celui qui occupe le bien d’autrui à titre de maître de manière paisible, publique, continue et non équivoque une action afin de lui permettre de défendre sa position. Mais pour intenter cette action, il doit être en possession du bien depuis au moins un an, sauf dans le cas où le possesseur a été dépossédé par violence ou par voie de fait. Pour ce dernier cas de figure, il peut intenter une action pour se faire réintégrer (action en réintégrande), qu’elle qu’ait été la durée de la possession. Il ne faut pas oublier qu’après 20 ans de possession paisible, publique, continue, non équivoque, le possesseur d’un terrain ou d’une maison en devient propriétaire par le fait de la prescription acquisitive ou usucapion (du latin usus, capere prendre par l’usage; à force d’en jouir, on finit par devenir en propriétaire). Rappelons que le juge de paix est le juge né des constats. Le procès-verbal qu’il dresse est cru jusqu’à preuve du contraire. Ce procès-verbal comporte deux parties. Une partie objective où il fait état de ce qu’il a vu et une partie subjective où le requérant fait des déclarations à l’appui de sa réquisition afin d’expliquer au juge de paix les raisons pour lesquelles il a requis le transport de l’appareil judiciaire sur les lieux pour que le procès-verbal en soit dressé. Il arrive des fois où le juge de paix se transporte sur les lieux en exécution d’une décision avant-dire droit ordonné par le tribunal. Dans ce cas, on parle de décision avant-dire droit interlocutoire car elle sera rendue en fonction du résultat de ce travail réalisé par le juge de paix. Lorsque les plaidoiries contradictoires ne permettent pas au juge de former sa conviction, il a pour devoir d’ordonner une mesure d’instruction. A suivre ! Jean-Robert Fleury
