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Le Nouvelliste

Le tribunal correctionnel «est incompétent pour connaître» l’affaire des sénateurs

Feb. 4, 2020, midnight

Le juge Benjamin Félismé a prononcé son jugement congé-défaut lundi, huit jour après avoir mis en continuation l’affaire mettant aux prises les «cinq sénateurs» avec le chef de l’État et son conseiller Jude Charles Faustin. Le tribunal s’est déclaré incompétent rationae personae pour connaître l’affaire soumise à son appréciation par les sénateurs. Il fait ainsi droit à la partie défenderesse ainsi qu'au ministère public qui avaient soulevé au procès les dispositions de l’article 185 et 186 alinéa a de la Constitution. Ces dernières permettent au président de la République de jouir du privilège de juridiction et de n’être passible que devant la Haute Cour de justice. Le juge en siège a rappelé qu’un tribunal d’un tel ressort ne peut juger un des agents de la fonction publique cités à l’article 186 susmentionné que s’il serait jugé et condamné par décision de la Haute Cour de justice à une peine de destitution, de déchéance ou de privation du droit d’exercer toute fonction publique pendant environ 15 ans. «Le sieur Jovenel Moïse, président de la République, n’est pas justiciable devant les tribunaux de droit commun pour les crimes et délits qu’il aurait commis dans l’exercice de ses fonctions, ce en vertu des articles 185 et 186 de la Constitution», a indiqué le magistrat. Les sénateurs qui ont accusé le président Jovenel Moïse et consorts d’abus de fonction et d'abus d’autorité contre la chose publique n’ont pas comparu à l’audience. Ils n’ont pas été représentés non plus par leurs avocats. Le tribunal les a renvoyés et a souligné qu’ils doivent saisir la juridiction compétente à faire valoir leurs droits. Étant un jugement rendu à charge d’appel, ces derniers pourraient s'opposer ou saisir une juridiction supérieure afin de casser cette décision judiciaire. Entre-temps la Haute Cour de justice et le Conseil constitutionnel sont inexistants et la Chambre des députés étant caduque, que peuvent faire d'autre les sénateurs ? «La partie civile ne peut dire qu’elle ne s’était pas défendue. Nous sommes satisfaits de la décision. Nous autres, nous nous penchons seulement sur le droit», a commenté Sarah Hélène R. Georges, avocate de la partie défenderesse. Pour la fille du populaire Me Raynold Georges, justice est faite aujourd’hui à travers la décision du tribunal. «Toute porte qu’ils vont frapper, ils tomberont sur nous», a ironiquement lâché l’avocate à l’encontre des sénateurs demandeurs, avant que son père, Me Raynold Georges, ne confie que «le cadenas et la clé sont entre les mains de Jovenel Moïse». On ne peut plus «lòk» quoi que ce soit. Par ailleurs, en présence des défendeurs de Jovenel Moïse, les avocats Champagne Cadichon et Thervil Pierrin, assistés de l’avocat-stagiaire Lacs-Guvens Cadette, ont exercé une action en référé devant le juge Merlan Belabre. Cette action vise notamment le commandant en chef de la Police nationale d’Haïti, Normil Rameau, et le directeur du Corps d’intervention et de maintien d’ordre, Joël Gentillon. Ces derniers sont cités à comparaitre au tribunal de première instance, devant le juge des référés, dans le délai d’un jour franc, soit mercredi prochain. À travers cette action, les sénateurs souhaitent que la justice demande aux responsables des forces de l’ordre de «lever sans terme ni délai» la mesure d’interdiction d’accès au Parlement qu’ils avaient prise au détriment de ces élus qui estiment être toujours en fonction. Par la même occasion, ils veulent que le tribunal interdise à la police de récidiver. À noter que les hauts fonctionnaires de la police cités n’avaient pas obtempéré à la sommation du 22 janvier 2020 qui les concernait.