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Le Nouvelliste

Amendement de la Constitution: vers un rendez-vous manqué

Sept. 5, 2019, midnight

Jamais la conférence des présidents ni à la Chambre des députés ni au Sénat n'a mis le principe de l'amendement de la Constitution dans leur ordre du jour, alors que ces deux branches du Parlement avaient formé des commissions spéciales pour travailler sur la révision de la loi mère.  Cette législature étant arrivée à terme, elle ne peut plus se prononcer sur le dossier. Jerry Tardieu, président de la commission spéciale sur l'amendement de la Constitution à la Chambre des députés, a reconnu que l'exécutif et le Parlement n'ont pas pu trouver une entente sur l'amendement de la Constitution pendant cette législature. Il a aussi souligné qu'il n'y a jamais eu d'entente non plus entre la Chambre des députés et le Sénat sur le dossier. Selon l’élu de Pétion-Ville, le Parlement n'a jamais non plus manifesté la volonté de mettre en débat le principe de l'amendement de la Constitution ! « Est-ce parce que la commission que je dirige avait recommandé que le chef de l'État ne soit plus considéré comme étant mineur ? Est-ce parce que nous avons proposé de faciliter la levée de l'immunité d'un parlementaire, la réduction du nombre des parlementaires, d’enlever la question de la décharge entre les mains des parlementaires ? Est-ce que c'est parce que la commission avait recommandé d’intégrer la diaspora dans les affaires du pays… ?», s’est questionné Jerry Tardieu. Il a souligné que l'équipe mise en place par le président de la République sur l'amendement de la Constitution ne l'a jamais contacté. Cette table ronde sur la Constitution à laquelle ont pris part des représentants de la classe politique, du secteur privé des affaires, du mouvement PetroChallenger, des parlementaires, des organisations de défense des droits humains, de l'université, de la jeunesse, des confessions religieuses, des membres de la diaspora et des personnalisés d'horizons divers, les avis entre l’amendement de la Constitution et une nouvelle constitution se confrontaient. La constitutionnaliste Mirlande Manigat a dit regretter que le processus d'amendement de la Constitution n'ait pas pu aboutir au Parlement tout en soutenant qu'il faut au pays une autre Constitution. « Parmi les 30 propositions d'amendements de la Constitution, Jerry Tardieu et moi sommes d'accord sur plusieurs points », a-t-elle affirmé. Toutefois, l’ancienne candidate à la présidence estime qu'une Assemblée constituante a beaucoup plus d'avantages et de possibilités pour discuter en profondeur de la loi mère. De son côté, l'écrivain et membre de l’organisation RADI Lyonel Trouillot a fait remarquer que la Constitution est un acte politique avant de soutenir que seule la conférence nationale ou toute autre structure du même genre peut décider pendant la transition s'il y a lieu d'amender la Constitution ou pas. Il faut rappeler que le "Rasanbleman pou Diyite Ayiti "(RADI) avait déjà appelé un combat collectif afin de forcer le président Jovenel Moïse à quitter le pouvoir. L'ancien Premier ministre Enex Jean-Charles, qui participait lui aussi à cette table ronde, a estimé que toute la population devrait avoir son mot à dire dans l'amendement ou dans l’élaboration d’une nouvelle Constitution. Il en a profité pour souligner plusieurs articles de la Constitution mal compris ou mal interprétés. Il a plaidé pour une nouvelle Constitution et aussi pour une terminologie du créole dans la compréhension de la Constitution. Contre toute attente, la sociologue Michèle Oriol dit se réjouir du fait que le principe de l'amendement de la Constitution n'ait pas été voté au Parlement. Elle a encore en mémoire le dernier amendement de la Constitution qui n’avait pas fait honneur au pays. « La Constitution n'est pas un jeu de spécialistes ! Il faut l'ouvrir pour que les gens en comprennent les enjeux », a-t-elle avancé. Cette table ronde était une occasion pour des représentants de différents secteurs de la société de faire valoir leur position sur l’amendement ou une autre Constitution. Alors que Jerry Tardieu et les autres membres de la commission spéciale sur l’amendement ont pris deux ans à travailler sur ce dossier et à formuler des propositions, la Chambre des députés n’a jamais statué sur leur travail. Changer de régime politique, rendre le président de la République passible des tribunaux de droit commun, réduire le nombre de parlementaires, alléger le processus d’amendement de la Constitution, créer des circonscriptions législatives à l’extérieur pour permettre aux Haïtiens établis hors d’Haïti d’élire des représentants au Parlement ; alléger le processus d’amendement de la Constitution sont, entre autres points qui figurent parmi les 30 propositions d’amendements de la Constitution faites par la commission Tardieu.