Le Nouvelliste
Les dérisions de la désespérance
Dec. 19, 2019, midnight
Dans une des trouvailles ou dérisions succulentes de la malice populaire, publiées sur les réseaux sociaux, un pince sans rire s’est demandé, s’il lui faut compter, 2019, au nombre de ses ans. Pour dire que, en toute logique, il n’a pas vécu sa vie durant cette «année lock», laquelle va contribuer, en dépit de tout, à rider sa face… Une autre, encore plus sarcastique, fait parler «Tonton Noël» qui, sous le poids des ans, renonce à venir en Haïti, cette année 2019, s’estimant trop vieux, épuisé, pour sauter les «barricades» dressées à chaque coin de rue. Nous autres, du Rassemblement des démocrates, nationaux, progressistes (RDNP) - qui vivons au rythme des palpitations, angoisses, tourments, mais, surtout, des aspirations, des rêves, de l’idéal de cette population haïtienne - ne saurions ne pas capter, même cachée sous le masque de la dérision, l’expression nette de son mal-être existentiel, de sa soif de vivre pleinement des moments-témoins de son ancrage viscéral à sa culture, à son identité, à son histoire. Culturellement, les fêtes de fin d’année et du nouvel an - par excellence, temps de partage, de communion, de ressourcement, de convivialité, de mondanité - ont, toujours, constituées pour elle, un moment de saouler ses peines, de sauter les barricades sociales, économiques, de transmettre aux générations montantes le goût du bonheur, de la vie heureuse, sinon, joyeuse ; le ferme espoir d’un lendemain meilleur… Ces trouvailles-dérisions sont, pour nous du RDNP, l’expression patente d’une désespérance, vive et grande, qui noue la gorge de toute une population pour étouffer les «Joyeux Noël» d’antan, lancés, en-veux-tu-en-voilà, dans l’insouciance des nuits de folie festive, mondaine. Aujourd’hui nous aînés, nous en parlons, pour les avoir vécues constituant une part de nous-mêmes, mais, en pensant amèrement à nos générations montantes, elles, coupées de la réalité enivrante de ces nuits avec leurs lazzis, quolibets et fourberies permissibles, privées de la féerie des pluies d’étoiles, des fanaux, des arbres et crèches de Noël rehaussant de beauté, de gaieté, chaque coin de rue, des fêtes de famille, des concerts, de l’ambiance des boîtes de nuit, de la fièvre des activités théâtrales, dansantes, des spectacles culturels. Tout ! Le temps, le décor des maisons, les marchés, les commerces, les rues, le climat se prêtaient à créer cette atmosphère propice à l’union, à la cohésion, à la convivialité, à la mondanité insouciante. Nous en parlons, pour avoir vécu l'espace de ces nuits, comme s’il s’agissait d’un rituel identitaire, citoyen, patriotique, donc, obligatoire et impérieux… Les temps ont bien changé, mais, pas pour le mieux. Les parents, adolescents et jeunes du pays vivent, désormais, dans l’épouvante de monstrueuses barricades, dressées sur leur route par les «bandits légaux» et belligérants, pour, non seulement, endiguer leurs justes revendications sociales, économiques et politiques, mais aussi, pour tuer leur espoir de vivre des instants de bonheur… L’espace d’une nuit de folie, d’une nuit de Noël… Même dans l’espoir d’une trêve, tout laisse croire que les populations des grandes villes vont rater la Noël de cette «année lok», pour des raisons économiques évidentes, mais, surtout, en raison de cette psychose de peur, nourrie par les troubles sociopolitiques, les manifestations violentes, les exactions des gangs armés. Même au cas d’une reprise en main réelle de la situation sécuritaire du pays, par les autorités policières, les habitants de ces villes n’ont pas le temps de planifier les activités entourant les festivités de Noël. De même, les compatriotes vivant à l’étranger n’ont plus le temps de planifier leur voyage en Haïti, moment de ressourcement dans la chaude terre natale. Heureusement que le pays profond reste, quelque peu, éloigné des troubles sociopolitiques, et, tant soit peu, accroché à ses traditions, à sa culture… C’est fort de toutes ces considérations que le RDNP, parmi ses éléments de politique sectorielle, pose, comme impérieuse, la reconnaissance de notre identité culturelle, fondement d’une appartenance commune à une même société et patrie. Un renouveau nécessaire à l’épanouissement de l’haïtianité, dans la manière dont nous devons nous voir nous-mêmes, dans la confiance que nous devons avoir dans nous-mêmes, dans la fierté que nous devons tirer de notre passé. Ce grand défi du changement profond et multidimensionnel - incluant ce redressement moral impérieux, cette nécessité de faire la politique autrement, cette véritable révolution des mentalités - nous, du RDNP, entendons le relever avec et pour notre peuple qui est désormais déterminé à associer Démocratie et Développement. C’est fort de toutes ces considérations que nous donnons cette garantie de prendre une direction pour retrouver les chemins de l’espérance, que nous avons le courage de souhaiter un Joyeux Noël à tous les Haïtiennes et Haïtiens, à tous les nationaux, démocrates, progressistes, dans le grand espoir qu’ils nous rejoignent dans cette croisade patriotique pour «Changer la vie en Haïti». Ensemble, ensemble, ensemble, jusqu’à la victoire finale. Met men, pran desten nou anmen. Eric Jean Baptiste Secrétaire Général , RDNP