Le Nouvelliste
Pens, graffeur à la folie
Jan. 27, 2021, midnight
Laurent Philippe est rentré comme un gant dans le thème retenu pour la 1re édition du festival « Haïti, le Printemps de l’Art, et écologie ». L’artiste a trouvé un moyen de combiner tous les éléments de l’ensemble. Il a réalisé en quatre heures le jour du festival devant un public curieux une fresque sur un plywood. L’œuvre dévoile un ciel clair qui exprime un nouveau jour sous lequel se trouve une main semi ouverte tenant une plantule plantée sur une pile de terre arrosée par un tuyau géant. Les trois doigts de la main tendent vers une poubelle recyclable. « Je suis un maitre du graffiti », s’enorgueillit l’artiste qui dit n’avoir rien planifié. Si Laurent Philippe est fier de se présenter comme tel, c’est parce qu’il a parcouru du chemin pour s’élever au rang des graffeurs de renom. Dès son enfance, il a été un fin dessinateur et l’envie le prend d’atteindre le sommet de cet art qu'est le graffiti. En arpentant plusieurs rues de la capitale pour suivre des séances de formation afin de se spécialiser, Pens a rencontré des devanciers haïtiens et des graffeurs étrangers qui lui ont permis d’appréhender le milieu en 2010 grâce à une formation suivie au Centre d’art. En 2015, soit cinq ans après, le mouvement du graffiti connait son essor dans le pays avec des pionniers comme Jerry et Assaf. Mais tout de suite des rumeurs circulent autour de cet art qui est vu aux yeux de certains exercé par des délinquants. L’artiste s’est vu, par conséquent, obligé de se cacher pour faire ses murales. « Je me souviens que je me levais à 4 heures du matin pour écrire sur les murs des gens. À cette époque, le street-art n’était pas connu, on m’a fait croire que c’était illégal; du coup je me cachais durant la journée, à l’aube je partais à la recherche de murs pour écrire », raconte-t-il. C’est parti d’un simple tag « nan epòk sa se non m mwen te konn ekri pou m te ka fè konnen gen yon grafè nan zòn nan ». Ensuite, il s'est mis à reproduire des portraits de femmes. En 2019, le graffeur s’est fait accepter dans son milieu. « Le graffiti est devenu mon métier », se réjouit-il. Désormais dans ses œuvres, l’artiste veut produire sur l’égalité entre homme et femme et sur le féminicide. Le graffiti, cet art contemporain, est une arme silencieuse. Il représente l’avenir du peuple haïtien qui fait face à de nombreuses difficultés parce qu’il dénonce et sensibilise au sort des Haïtiens, croit le graffeur Laurent Philippe, dit Pens, qui veut lancer une révolution mentale.