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Le Nouvelliste

Qui pour manipuler les respirateurs mécaniques?

March 27, 2020, midnight

Les personnes infectées du Covid-19 qui développeront la forme grave nécessiteront une assistance respiratoire pour survivre. En manque de machines (respirateurs artificiels) et de ressources humaines qualifiées, les spécialistes de la santé prédisent qu’Haïti pourrait faire face à une hécatombe. Le gouvernement a annoncé une réquisition de certains appareils sans annoncer de mesures pour former ceux qui vont les manipuler. Des spécialistes rappellent que les machines ne valent rien sans les experts. Pour le Dr Denise Fabien, professeur d'anesthésiologie à l'Université d'État d'Haïti, cela ne devrait pas être un exercice difficile pourvu qu'on utilise des professionnels de santé qualifiés. « Les réanimateurs, les anesthésiologistes, les urgentistes devraient pouvoir utiliser un respirateur mécanique.» Cela peut se faire à l'aide d'une intubation, mais si la personne a besoin d’une ventilation mécanique pendant plusieurs jours, les médecins peuvent insérer la sonde directement dans la trachée, en pratiquant une petite incision dans la partie antérieure du cou (trachéotomie). Une trachéotomie est plus sûre et plus confortable pour la ventilation à long terme. La sonde est raccordée au respirateur «Même une intubation peut être difficile quelle que soit la pathologie, dans ce cas de dépression respiratoire aiguë, il faut sédater pour intuber, et je pense que les experts le savent. Mais pour une intubation difficile, les anesthésiologistes plus habitués à  ce geste sont recommandés », a soutenu le Dr Denise Fabien, médecin d'une grande réputation dans l'anesthésiologie et la prise en charge de la douleur.  Elle souligne, par ailleurs, que "les mesures d'hygiène sont les mêmes mais une désinfection rigoureuse du matériel est impérative, car nous possédons très peu de matériel à usage unique. La protection du soignant est aussi important que la protection du patient qui est cependant le plus vulnérable." Selon une source bien placée au sein de la Société haïtienne d'anesthésiologie, il y a entre 70 et 100 anesthésiologistes en Haïti. « Tout a été pris à la légère. C’est au cours de ces dernières semaines que les autorités essayent de mettre les bouchées doubles », a estimé, de son côté, Stephan Dragon, un inhalothérapeute qui a travaillé pendant 23 ans dans les meilleurs hôpitaux américains. Le spécialiste, en interview avec le journal le vendredi 28 mars, présente un tableau un peu inquiétant de la situation du pays en termes de disponibilité de respirateurs et de ressources humaines qualifiées. « Si vous trouvez 10 respirateurs dans un hôpital, il y a à peine deux qui fonctionnent. Quand les appareils sont disponibles, vous ne trouvez pas les ressources humaines qualifiées pour les faire fonctionner », a expliqué M. Dragon, affirmant que cette spécialité est sous-pratiquée en Haïti. Malgré ses démarches, ajoute-t-il, il n’a pas pu faire comprendre aux médecins haïtiens « qu’on ne peut pas pratiquer la médecine sans la ventilation. Le système de santé haïtien laisse mourir tout patient qui a une insuffisance respiratoire. Stephan Dragon, qui affirme vouloir mettre son expertise au service des autorités en vue d’aider à lutter contre le coronavirus, explique qu’il est disponible pour former le personnel de santé. Il dit espérer que les responsables tirent profit de cette situation sanitaire complexe. Face à la pandémie Covid-19, certaines personnes présentant une insuffisance respiratoire nécessiteront une ventilation mécanique (machine qui aide l’air à entrer dans les poumons et à en sortir) pour faciliter la respiration. Pour pallier le manque de ventilateurs, le gouvernement haïtien a annoncé une réquisition de respirateurs mécaniques en vue de prendre en charge les cas les plus compliqués. En carence de spécialistes, certains médecins rappellent que les machines ne valent rien sans un personnel adéquat. « La ventilation mécanique requiert des connaissances et expertises pour la manipulation et le maintien de ces appareils », a fait savoir le Dr Renée Alce, intensiviste de carrière. Edrid St Juste et Claudy Junior Pierre