Le Nouvelliste
La justice haïtienne de crise en crise
Jan. 4, 2021, midnight
« Catastrophique ». Ce terme résume à lui tout seul l’année qu’ont vécue les justiciables qui n’ont pu assister qu'aux arrêts de travail des magistrats debout et assis, des greffiers ainsi que des commis-parquet. La malédiction semble poursuivre la dame aux yeux bandés, alors que le Collectif des magistrats debout haïtien (COMADH) a annoncé une trêve à leur arrêt de travail lancé depuis le 23 novembre 2020. Une rencontre tenue avec les responsables du ministère de la Justice le 30 décembre 2020 semble être à la base de cette décision des commissaires du gouvernement réclamant l’égalité de traitement entre juges et officiers du ministère public. Les greffiers ne se font pas prier pour prendre la relève. Dans une note en date du 3 janvier 2021, l'Association nationale des greffiers haïtiens (ANAGH) dit prendre acte de l’inaction du ministère de la Justice après trois mois de grève et deux mois de trêve. Pour la quatrième année consécutive, les greffiers et commis-parquet, pour réclamer des avantages sociaux, cessent toute activité. À partir du mardi 12 janvier 2021, ils observeront une grève jusqu’à ce que leurs revendications soient satisfaites, a fait savoir Ainé Martin, président de l’ANAGH. Les greffiers et commis-parquet, au moment d’annoncer la trêve en octobre 2020, avaient prévenu qu’ils reviendraient à la charge si les acteurs concernés ne prenaient aucune mesure pour appliquer notamment l’accord de 2017. L’ANAGH principalement avait obtempéré, à la demande de la Fédération des barreaux d’Haïti qui plaidait en faveur de l’accès à la justice. À l’instar des greffiers, dans leur note, les magistrats debout préviennent « la République que si les autorités persistent dans leur mauvaise foi et leur attitude menaçante […], les magistrats debout adopteront la position contraire et continueront à se mettre au travers de la voie de l'arbitraire ». Ces acteurs de la chaîne pénale disent espérer que les autorités gouvernementales prendront de justes décisions dans le plus bref délai pour respecter la loi, les principes de non-discrimination administrative et juguler cette crise. Les mises en garde sont le propre des auxiliaires de justice à l’égard de la nonchalance des autorités étatiques qui, trop souvent, ne font que des promesses pour amadouer les protestataires. À cela, il ne faut pas oublier que le budget d’investissement – l’un des chevaux de bataille des juges – n’est pas encore transféré au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ). Ces revendications non satisfaites, depuis environ quatre années, n’engendrent que des crises récurrentes préjudiciables aux justiciables.