Le Nouvelliste
Les Etats-Unis souhaitent des élections... l'opposition aussi, mais sans Jovenel Moïse
Jan. 23, 2020, midnight
Le chef de la diplomatie américaine, Michael Pompeo, a appelé Haïti à élaborer un calendrier électoral et à fixer une date pour réaliser les prochaines élections. « C’est la chose la plus importante. Nous avons besoin des élections. C’est important », a-t-il insisté, lors d’une interview exclusive au Miami Herald, jeudi 23 janvier 2020. Le gouvernement a la compétence, la capacité et le droit de réaliser ces élections, a souligné Michael Pompeo après une rencontre avec son homologue haïtien Edmond Bocchit. https://www.miamiherald.com/news/nation-world/world/americas/haiti/article239566313.html?fbclid=IwAR0m_NwLWBk-nvszlDak5JY7ebq0bhMYVep9zD6ARg0-9zHcV3rx-qdsGBA Le président du Parti Haïtien Tèt Kale, Liné Balthazar, a souligné que le chef de la diplomatie américaine a exprimé une position longtemps soutenue par son parti. « Je suis très content que l’administration américaine dise la même chose que nous sur la tenue des élections », a-t-il dit, soulignant qu’il est nécessaire, pour la bonne santé de la démocratie en Haïti, d’avoir des élections dans les délais réguliers pour renouveler le personnel politique. « Le président Moïse ne peut pas faire l’économie d’un accord politique parce qu’en période de vide institutionnel, en l'absence du Parlement, il est toujours bon d’avoir un accord politique », a aussi indiqué Liné Balthazar, estimant qu’un accord politique doit encadrer la mise en place d’un nouveau gouvernement, une feuille de route, un calendrier électoral. Le chef du PHTK croit que le président a besoin de cet accord pour que le pays revienne à la normalité institutionnelle. « Les Américains avaient reconnu l’élection de Jovenel Moïse alors que nous, comme organisation, ne l’avions pas reconnue. Il est tout à fait normal que les Américains continuent sur la route du semblant de démocratie en Haïti », a commenté Joël Edouard Vorbe du directoire de Fanmi Lavalas qui n’avait jamais reconnu la validité de l’élection du président Jovenel Moïse. « La réalité que nous vivons aujourd’hui est différente. Tout Haïtien sait qu’aucune élection n’est possible avec Jovenel Moïse, a-t-il poursuivi. Ces trois dernières années, le président Jovenel Moïse, avant le dysfonctionnement du Parlement, n’avait rien fait pour la tenue des élections, a indiqué Joël Edouard Vorbe. « Je crois que le secrétaire d’Etat américain est totalement en dehors de la réalité politique haïtienne. Aujourd’hui, nous avons en Haïti un chef d’Etat illégitime, rejeté par la population. Personne ne fait confiance à ce président et aucun groupe politique sérieux n’acceptera de participer à des élections convoquées par ce chef d’Etat », a confié au journal Me André Michel, porte-parole du Secteur démocratique et populaire. « Je peux dire qu’il n’y aura pas d’élections avec Jovenel Moïse. La solution à la crise passe par sa démission. C’est justement à ce carrefour qu’on attendait Jovenel Moïse. Il ne peut pas garantir l’alternance politique. Personne n’acceptera qu’il puisse organiser des élections dans ce pays », a-t-il affirmé. L’un des porte-parole de Nou pap dòmi,Velina Charlier, a estimé que les Américains encouragent un autocrate à organiser des élections. Plus loin, elle a évoqué le « scandale » autour de la carte d’identification Dermalog. Les cartes d’identification sont faites sans cadre légal et le président Moïse, alors que sa femme était déjà éclaboussée dans cette affaire, a avoué avoir choisi cette firme. Cela suscite de sérieux doutes sur la transparence et la fiabilité des élections souhaitées par les Américains, a expliqué Vélina Charlier. L’appel des Etats-Unis à ce que le cap soit mis sur les élections intervient à un moment où le président Jovenel Moïse peine à trouver un accord politique. Il arrive aussi à un moment le chef de l’Etat s’est prononcé en faveur d’une nouvelle Constitution à adopter par voie référendaire, en dehors de la procédure d’amendement tracée par la Constitution de 1987.