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Le Nouvelliste

Tableau sombre d’Haïti peint au Conseil de sécurité de l’ONU…

Feb. 20, 2020, midnight

Le grand oral sur Haïti au Conseil de sécurité de l'ONU n’a pas été agrémenté d’informations sur des améliorations significatives. Loin s’en faut. Le tableau est sombre dans presque tous les domaines. La militante des droits de l’homme Marie Yolène Gilles, l’une des responsables de la Fondation Je Klere, et la représentante du secrétaire général de l’ONU en Haïti Helen La Lime ont peint un climat de la détérioration des droits humains et d’affaiblissement de l’Etat de droit. Sans détour, Marie Yolène Gilles, citée dans un article du Miami Herald, a affirmé que beaucoup d’Haïtiens sont dans l’insécurité alimentaire, font face au kidnapping contre rançon, au viol, à la violence des gangs qui a poussé les tribunaux à fermer leurs portes pendant plusieurs mois dans la juridiction de Port-au-Prince. 23 gangs armés sont disséminés dans la capitale (Port-au-Prince), et le tiers du territoire est sous le contrôle des gangs. La liberté de circulation n’est pas garantie ni le droit au respect de l’intégrité physique et de la dignité de la personne humaine, a souligné Marie Yolène Gilles qui intervenait par vidéoconférence depuis Port-au-Prince. Les routes sont dangereuses, les fiefs des gangs sont devenus inaccessibles pour la police. «Nous avons été témoin de tueries odieuses, de décapitations, de viols, de la corruption…», a détaillé Marie Yolène Gilles. La profonde crise économique, sociale et politique est précisément la raison pour laquelle la République dominicaine s’était opposée au retrait de la mission de maintien de la paix de l’ONU en Haïti en octobre dernier, a confié de son côté l’ambassadeur de la République dominicaine à l’ONU, José Singer. « Aujourd’hui, nous pouvons constater avec tristesse le chaos qui en a résulté », a poursuivi le diplomate dominicain. « Où sont les résultats ? Une profonde crise constitutionnelle, une violence rampante alimentée par des trafics illicites et l’accumulation excessive d’armes de poing, de munitions ayant contribué de manière significative à l’expansion des gangs et du crime organisé. Les tueries et homicides provoqués par ces gangs mettent à risque les progrès réalisés ces 15 dernières années, a-t-il dit. Helene La Lime a fait remarquer que durant les négociations politiques de la mi-décembre et de janvier entre des membres de l’opposition modérée et les représentants du PHTK, les contours d’un accord politique ont été définis autour de quatre éléments : les critères pour la formation d’un gouvernement, le contenu de l’agenda de réforme, le processus de réforme constitutionnelle et l’établissement d’un calendrier électoral. En dépit des progrès sur la nature des réformes à effectuer, incluant celle de la Constitution, les acteurs politiques ne sont pas encore parvenus à la formule qui permettrait au président Moïse de désigner un Premier ministre et de former un gouvernement, a déploré Helene La Lime. La représentante du secrétaire général de l'ONU souligne que l’absence d’accord sur ce sujet et sur le reste du mandat du président Moïse menace de prolonger une situation qui a déjà trop duré.    L’envoyée des Nations unies en Haïti a déploré l’impasse politique dans laquelle demeure le pays depuis juillet 2018 et appelé les acteurs politiques à faire preuve de leadership pour sortir de la crise. Une « impasse politique » qui, selon la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU en Haïti, a « paralysé le fonctionnement des institutions haïtiennes, plombé l’économie du pays et alimenté une insécurité continue ». L’ONU, l’Organisation des Etats américains (OEA) et le Saint-Siège ont organisé deux séries de négociations mi-décembre 2019 et fin janvier 2020. « Un consensus a émergé autour d’un accord politique autour de quatre éléments », a dit Mme La Lime : les critères sur la formation d’un gouvernement, le contenu du programme des réformes, le séquençage d’un processus de réforme constitutionnelle et la définition d’un calendrier électoral. « Malgré des progrès concernant la nature des réformes qui doivent être entreprises, y compris celui de la Constitution, les acteurs politiques doivent encore se mettre d'accord sur une formule qui conduirait à la désignation par le Président Moïse d'un Premier ministre consensuel et la formation d'un nouveau gouvernement », a dit la Représentante spéciale. L'absence d'accord sur cette question, ainsi que sur la durée restante du mandat du Président Moise, « menace de prolonger inutilement une situation qui a déjà duré trop longtemps », a dit Mme La Lime. 4,6 millions d'Haïtiens ont besoin d'une assistance « Haïti s'apprête à entrer sa deuxième année avec un gouvernement intérimaire, son économie devrait sombrer plus profondément dans la récession, et on estime maintenant que 4,6 millions de ses citoyens ont besoin d'une assistance humanitaire », a dit la cheffe du Bureau des Nations Unies en Haïti (BINUH). Les conséquences d’une économie sous tension et de la polarisation politique prolongée risque d'affecter davantage l'intégrité et l'efficacité d’institutions clefs, telles que la Police nationale haïtienne, a prévenu l’envoyée de l’ONU. « Pour éviter une plus grande détérioration, les dirigeants haïtiens doivent saisir l'occasion de s'engager à sortir de cette impasse afin de servir au mieux les intérêts de leur peuple », a dit Mme La Lime. Pour la cheffe du BINUH, seule la « combinaison d'une forte volonté nationale et d'un ferme soutien international » peut permettre à Haïti de surmonter la crise Deson cîté, l’ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU Kelly Craft a fait savoir qu’Haïti a besoin de réaliser au plus vite les élections législatives pour avoir un gouvernement pleinement fonctionnel capable de répondre aux besoins du peuple Haïtien. Haïti doit pouvoir choisir ses leaders. Alors que les réformes constitutionnelles sont nécessaires et les bienvenues, elles ne doivent pas constituer un prétexte pour retarder les élections, a déclaré Mme Craft. Fritzner Gaspard, le représentant d’Haïti, a reconnu que le pays est confronté à des temps difficiles qui menacent l’ordre social. Il a évoqué la dépréciation de 22 % de la gourde par rapport au dollar l’an passé, la diminution de 4, 3 % des revenus fiscaux par rapport à l’année 2018 et la perte massive d’emplois. Le gouvernement n’a pas pu atteindre les 3,4 % de taux de croissance du PIB prévu, a-t-il dit, soulignant que les autorités ont pris note de toutes les préoccupations exprimées. Il a évoqué les discussions politiques effectuées pour trouver une issue à la crise politique.