Le Nouvelliste
Le Covid-19 : un véritable coup de massue pour les universités haïtiennes, des responsables en parlent…
May 8, 2020, midnight
« L’université haïtienne au temps du Covid-19 : défis, opportunités et perspectives pour la reprise et la reconstruction dans le contexte post-pandémie » a été le thème retenu pour permettre à ce que des acteurs de l’université informent de l’état de la situation chez eux. En effet, tous, allant du vice-recteur aux affaires académiques de l’Université d’Etat d’Haïti, Hérold Toussaint (qui intervenait en lieu et place du recteur Fritz Deshommes), en passant par le recteur Ciné Syriaque (qui représentait le réseau des Universités publiques en région (UPR), jusqu’au recteur de l’Université Notre-Dame d’Haïti (UNDH), Jean Marie Louis, ils reconnaissent que les universités haïtiennes n’étaient pas préparées à faire face à la crise provoquée par la pandémie qui vient les affaiblir davantage. « Nous sommes en train de faire ce qui est possible. Nous n’avons pas les instruments que nous devrions avoir pour répondre à cette grande crise qui dévoile en Haïti et ailleurs les failles de tout système d’enseignement… », avance, d'entrée de jeu, Hérold Toussaint, vice-recteur de l’UEH, institution publique qui accueille environ trente mille étudiants. Pour le moment, les acteurs sont en train de mobiliser toutes leurs ressources afin d'essayer d’apporter une réponse adéquate. « Nous avons toutes les limitations physiques, économiques, sociales et organisationnelles. Nous sommes incapables de mobiliser totalement nos étudiants… », martèle le responsable, qui prévoit des impacts fâcheux de la pandémie sur la communauté universitaire. Pour sa part, le représentant des Universités publiques en région (accueillant environ dix mille étudiants répartis dans les dix départements du pays), Ciné Syriaque, recteur de l’Université publique du département du Nord-Ouest, a souligné leurs difficultés, mais surtout l’absence de moyens pour poursuivre l’enseignement dans leur réseau dont le fonctionnement dépend du ministère de l'Éducation nationale. En dépit du fait qu’ils disposent de certains appareils pour poursuivre des activités en ligne, se posent les problèmes de connectivité mais surtout de l’énergie pour étendre l’expérience de la formation en ligne à leurs étudiants. Une situation accablante qu’ils ne sont pas prêts à résoudre sans une intervention de l’État, concède le dirigeant. « Beaucoup d’entre nos professeurs, qui sont des travailleurs de la connaissance, vivent avec une grande inquiétude, d’un point de vue économique. Ils sont plongés dans le chômage. Il n’y a pas moyen pour eux de vivre de manière décente avec l’apparition de cette pandémie », décrit-il. Abordant la réalité avec une vue plus générale, le recteur Ciné Syriaque fait état de l’absence de leadership de l’université haïtienne qui devait aider la société à mieux cerner cette pandémie tout en proposant aux dirigeants du pays des pistes de solution. « On est à un niveau où l’université haïtienne n’est pas capable de jouer son rôle de leader dans la crise », regrette le responsable. « Le Covid-19 révèle que nous avons un problème dans l’enseignement (de qualité) dans le pays. Nous sommes dans la misère technologique. Il y a une incompétence scientifique dans le secteur. L’université s’est révélée impuissante en cette période de crise engendrée par le coronavirus ». C’est ce qu’avance, par ailleurs, dans son analyse de la situation, le recteur de l’Université Notre-Dame d’Haïti (UNDH), Jean-Marie Louis. Pour le professeur, la pandémie a déstabilisé le calendrier de l’institution universitaire, les professeurs, les étudiants, la gouvernance académique et tout le reste y compris. Le coronavirus affaiblit davantage les institutions d’enseignement supérieur dans le pays. Quasiment toutes les activités académiques sont interrompues. Sinon, quelques-unes d’entre elles tentent de s’organiser, tant bien que mal, afin de sauver l’année académique, notamment en réfléchissant à l’option de la formation à distance, laquelle comporte un ensemble de défis que ces institutions ne sont pas en mesure de relever. Pas de moyens. Tous les intervenants admettent que la crise les dépasse. C’est en ce sens qu’ils appellent à l’unanimité à l’intervention de l’État, de la société civile et d’autres institutions (internationales) pour aider les universités à sortir de l'impasse. Ils croient aussi que la crise offre l’occasion de développer des solidarités, des coopérations entre les différentes institutions et surtout de réfléchir à de nouvelles manières d’orienter l’enseignement supérieur dans le pays.