this used to be photo

Le Nouvelliste

Haïti pris au piège des kidnapings 

Jan. 25, 2021, midnight

Les kidnappings se multiplient depuis plusieurs mois. Les criminels, bien organisés, utilisent des véhicules ressemblant à ceux des forces de sécurité. Ils utilisent des plaques immatriculées Service de l’État (SE), portent des uniformes d’unités de la PNH, sont lourdement armés. Ils séquestrent leurs victimes dans des lieux connus des forces de l’ordre. Sur les réseaux sociaux, des noms, des visages défilent. A la radio, les témoignages de victimes, de parents de victimes de kidnappings glacent le sang. Des « pitit manman mari », des protestants, des pasteurs, des prêtres, des vodouisants, des francs-maçons, l’athée, l’étudiante, le musicien, la marchande de saucisse, le commerçant, les fils…personne n'est épargné. Nous sommes devenus des « ti poule » tranquilles, proies de ces « malfinis », de ces criminels bien organisés, capables de générer de l’argent et de profiter d’un écosystème criminel pour blanchir leur argent. Ils sont des entrepreneurs, ont des entreprises écrans, ont des mulets, des gens prêts à blanchir leur argent sale. Ils ont des connexions connues avec le milieu politique. Face à ces organisations complexes opérant dans l’ombre et dans la lumière avec des chefs de gangs connus, assumant clairement leur statut, il y a de l’émotion, de la colère. On dénonce ici, on manifeste là. Mais la partie saine du pays peine à faire communauté face aux kidnappings qui se banalisent, qui  deviennent ordinaires, presque des faits divers. En partie à cause de la poursuite de ces faits délictueux, de la connivence connue entre ces criminels et des gens puissants. Et surtout à cause de l’incapacité des pouvoirs publics à éradiquer le phénomène. Il saute aux yeux que la PNH, sans coudées franches, se remue, multiplie des opérations qui peinent à convaincre monsieur Tout le Monde de son efficacité. Il y a eu des descentes sur les lieux, des opérations type « gaye pay ». Cependant, les bandits ne sont pas inquiétés. Avec les réseaux sociaux, la PNH perd souvent la bataille de la communication face aux bandits. Lanmò 100 jou de 400 Mawozo, recherché par la police, qui capture et interroge un policier pour savoir s’il avait participé à l’opération dans son fief, peut ébranler des certitudes. Les kidnappings de quatre policiers, dont un inspecteur de police, ces derniers jours sont loin de rassurer.   Entre-temps, les criminels, leurs alliés continuent de tester les occupants des zones urbaines où l’on peine encore à faire communauté. Les kidnappeurs sont applaudis quand ils entrent avec leurs victimes. Il y a ceux qui débattent, en sachant pertinemment que leur proximité avec des criminels connus participe à une forme de légitimation de ces derniers. Ici où les criminels ont un statut, sont des partenaires politiques, des partenaires d’affaires, certains sont sceptiques au point de croire que le kidnapping a encore de beaux jours devant lui, au grand dam de la prochaine victime.