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Le Nouvelliste

La règlementation du crédit-bail : s’équiper à moindres frais

June 9, 2020, midnight

Le décret du 9 avril 2020 réglementant les opérations de crédit-bail, paru au Moniteur, no. spécial 5 du 12 mai 2020, dote la législation haïtienne d'un mécanisme de financement qui revigorera le monde du crédit haïtien et facilitera la création et l’équipement des petites et moyennes entreprises : le crédit-bail. Inséré dans le Livre 1er du Code de commerce consacré au commerce en général, ses dispositions constituent le chapitre III du Titre VII régissant les contrats commerciaux. Le crédit-bail, leasing en anglais, est un dispositif de financement, matérialisé par un contrat écrit, par lequel une personne morale, appelée crédit-bailleur, met à la disposition d'une personne, appelée crédit-preneur, un bien, moyennant l'engagement de le louer pour une durée déterminée en contrepartie de loyers. Il comprend deux périodes: une première période pendant laquelle les rapports entre les parties sont caractérisés par une location et une deuxième période qui permet au crédit-preneur, à l'échéance de la période de location, d'acquérir, s'il le souhaite, l'équipement à sa valeur résiduelle. L'originalité et l'utilité du crédit-bail résident dans le fait qu'il permet à des personnes ne disposant pas des moyens financiers nécessaires d'avoir accès aux biens essentiels à l'exploitation de leurs entreprises, et éventuellement d'en effectuer l'acquisition. Les parties peuvent aussi convenir, en cas d’obsolescence du bien loué, de son remplacement par le crédit-bailleur et à ses frais, sur demande du crédit-preneur. Cette possibilité est particulièrement utile dans le cas d’équipements informatiques ou de télécommunications. Le contrat de crédit-bail se distingue ainsi de la location simple, de la vente, de la vente à crédit, de la vente à tempérament et de la vente avec clause de réserve de propriété. Il présente les avantages suivants. Il garantit au crédit-preneur, durant la période initiale, l'utilisation et la jouissance du bien loué pendant un délai minimum à un prix fixé d'avance, comme s'il en était le propriétaire, à charge pour lui de l’assurer et de l’entretenir. Durant cette période, il ne peut ni vendre, ni gager, ni nantir, ni hypothéquer le bien loué. En contrepartie, il paye des loyers dont l’ensemble couvre une grande partie du coût du bien objet du contrat. Le crédit-bail assure au crédit-bailleur la perception d'un certain montant de loyers, tout en conservant ses droits de propriétaire, pour une période appelée période irrévocable, pendant laquelle il ne peut être mis fin à la location, sauf en cas d’inexécution de ses obligations par le crédit-preneur. Dans ce dernier cas, la reprise du bien lui est légalement garantie en quelque lieu qu’il se trouve. S’il s’agit d’un bien mobilier, le droit de reprise s’exerce à l’encontre de tout détenteur, même de bonne foi, lequel ne pourra opposer au crédit-bailleur le principe « en fait de meubles, possession vaut titre » exprimé à l’article 2044 du code civil. Le crédit-bail permet au crédit-preneur de diminuer ses impôts sur le revenu puisque les loyers payés au titre de la location de l'équipement ou de l’immeuble sont intégralement comptabilisés comme des dépenses d'opération. Ce point est important, car s’il avait acquis directement l’équipement par le biais d’un emprunt ou d’une vente avec réserve de propriété, seuls les intérêts de ses remboursements seraient déductibles d’impôt. Des dispositions fiscales avantageuses sont également prévues pour les entreprises se livrant aux opérations de crédit-bail. À l’issue de la période initiale, le crédit-preneur a la possibilité d'acquérir le bien loué pour une valeur résiduelle tenant compte des loyers perçus, s'il décide de lever l'option d'achat. Dans ce cas, les rapports entre les parties sont remplacés par des rapports de vendeur à acheteur régis par les dispositions de droit commun sur la vente sauf, pour des raisons évidentes, celles relatives à la garantie des vices apparents ou cachés. Les parties peuvent au contraire  renouveler la location pour une durée et un loyer à convenir. La troisième possibilité réside dans le droit pour le crédit-preneur de simplement restituer le bien loué à la fin de la période initiale de location.  Étant donné les difficultés financières, notamment de trésorerie, auxquelles peuvent faire face les petites et moyennes entreprises, l'établissement d'un dispositif juridiquement encadré leur permettant d'avoir accès aux biens mobiliers et immobiliers dont ils ont besoin pour fonctionner durablement se pose comme étant une nécessité. Gageons que la promulgation de ce décret insuffle un nouvel élan au circuit du crédit.