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Le Nouvelliste

Coronavirus : les policiers s’ajustent et s’équipent lentement

April 2, 2020, midnight

Au commissariat de Port-au-Prince ce jeudi, 2h33, des policiers devisent dans la cour. Deux d’entre eux discutent avec un vendeur pour acheter des chaussures. À quelques mètres, des sapeurs-pompiers sont assis dans leur caserne fissurée par le séisme du 12 janvier et calment leur faim avec quelques pains tartinés de manba (beurre d'arachide). Aucun souci pour la distanciation sociale. Dans ce commissariat, la peur de la propagation du coronavirus est absente. Le seul seau, le fameux bokit, qui pourrait faire penser à la maladie, est placé dans un endroit quasi inaperçu.  Au commissariat de Port-au-Prince, policiers, employés civils, visiteurs et prévenus se côtoient sans masque, sans cache-nez et sans aucun autre matériel de protection. Pour atteindre la réception, il faut s’armer de courage pour affronter une meute de mouches et une odeur d’urine épouvantable. Le responsable de ce commissariat, contacté par le journal, n’était pas en mesure de répondre à nos questions parce qu’il était en réunion.  Le responsable du sous-commissariat de Canapé-Vert n’était pas non plus présent lors de la visite du journal. Un agent trouvé sur place a cependant indiqué que les policiers sont dépourvus de matériel de protection pour faire leur travail dans le contexte du coronavirus. « Nous sommes dépourvus de tout. Nous n’avons qu’un seul seau placé à l’entrée. Nous sommes obligés de collecter nos propres moyens pour acheter du chlore afin de nous laver les mains. Les rares cache-nez et « hand sanitizer » dont nous disposons nous ont été offerts par de bons Samaritains », a confié cet agent qui estime que leur travail est beaucoup plus apprécié par les particuliers que par les autorités étatiques.  L’agent interrogé au sous-commissariat du Canapé-Vert a  fait savoir au journal les dispositions adoptées pour respecter la distanciation sociale et limiter la propagation du virus. « Personne n'entre dans l’espace sans s'être d'abord se laver les mains à l’entrée. Quand quelqu’un vient porter plainte, il lui est exigé de se tenir à 1.5 mètre de distance. Ceux qui visitent les prévenus en garde à vue sont autorisés à leur parler durant une minute. Quand quelqu’un doit être placé en garde à vue, il doit d’abord prendre sa douche. L’espace de la garde à vue est désinfecté tous les matins », précise l’agent, qui demande aux autorités de fournir au sous-commissariat du matériel de protection et des désinfectants.  Le commissariat de Pétion-Ville a été aspergé et désinfecté mardi et mercredi de cette semaine. C’est ce qu’a fait savoir l’inspecteur Jean Millry Lagrenade, responsable adjoint de ce commissariat. Il a souligné que des seaux, de l’eau et du savon sont placés à l’entrée afin que ceux qui doivent fréquenter l’espace puisse se laver les mains. Cependant, l’inspecteur Lagrenade a fait savoir que les policiers ne sont pas encore équipés de matériel pour se protéger. « Il nous faut des masques, des gants, du gel désinfectant, etc. », a-t-il sollicité. Ce responsable a également indiqué que beaucoup d’efforts ont été consentis pour désengorger la garde à vue. « Chaque cas est transféré le jour même ou le lendemain au tribunal. À titre d’exemple, nous n’avons qu’un seul prévenu placé en garde à vue ce jeudi », soutient-il.  Parmi tous les postes de police visités ce jeudi, seul le commissariat de Delmas avait déjà reçu des masques de protection fabriqués par des policiers à l’académie de police. C’est la responsable de la police communautaire, la commissaire Magalie Belneau, qui a remis un lot de matériels au commissaire Jean Gospel Monélus, responsable du commissariat de Delmas. La commissaire Bellereau a mis l’accent sur la portée économique de ces cache-nez réutilisables.  Jean Gospel Monélus, responsable du commissariat de Delmas, a ajouté que ses troupes commencent à être équipées pour affronter l’épidémie. « Aujourd’hui, nous avons reçu des masques de protection. Il s’agit d’une initiative de la direction générale. Nous saluons la bonne volonté des plus hautes autorités du pays et de la PNH », a-t-il déclaré.  Le responsable de la police de Delmas a indiqué que des mesures ont été adoptées depuis plusieurs semaines pour limiter la propagation du coronavirus. « La distanciation sociale est respectée. Tous ceux qui fréquentent le commissariat, y compris les policiers et les responsables, doivent se laver les mains avant d'y entrer. Nous organisons également des séances de formation aux policiers sur la maladie. Avec le peu de moyens dont nous disposons, nous nettoyons régulièrement les blocs sanitaires », a-t-il fait savoir.  Par ailleurs, la commissaire Magalie Bellereau a indiqué que la police communautaire est sur le front dans la lutte contre l’épidémie de coronavirus. Elle souligne que sa troupe mène plusieurs activités de sensibilisation et de distribution dans les quartiers. « Cette semaine, nous participons à des émissions dans les médias pour sensibiliser la population à la maladie. Nous avons également un sound track avec lequel nous diffusons des messages. En partenariat avec des leaders communautaires, nous serons au Pont-Rouge et à Delmas 2 ce vendredi. Nous allons distribuer de l’eau potable. Nous aidons également les autorités dans la distribution de produits alimentaires. Tout ce qui se fait a été autorisé par le directeur général de la PNH, Rameau Normil », a-t-elle fait savoir, soulignant que les agents disposent de masques et kits sanitaires pour pouvoir mener leur mission.