Le Nouvelliste
Plusieurs associations de magistrats réclament la libération expresse du juge Yvickel Dabrésil
Feb. 9, 2021, midnight
L’Association nationale des magistrats haïtiens, l’Association professionnelle des magistrats haïtiens et le Réseau national des magistrats ont donné une conférence de presse conjointe le lundi 8 février pour dénoncer «l’arrestation arbitraire» du juge de la Cour de cassation Yvickel Dabrésil, qui, selon le chef du gouvernement haïtien, Joseph Jouthe, est impliqué dans une tentative de coup d’État. Les responsables de ces différentes structures réclament la libération sans condition du juge. Ils menacent de saisir la Cour interaméricaine des droits de l’homme au cas où les autorités refuseraient de s'astreindre à cette exigence. Pour l’instant, les magistrats réunis au sein de différentes associations de magistrats qui volent au secours du juge Yvickel Dabrésil, arrêté le dimanche 7 février, pour tentative de coup d’État, disent miser plutôt sur la forme que le fond. Ikenson Edumé, président du Réseau national des magistrats, rappelle que, de par leur statut, les juges de la Cour de cassation bénéficient du privilège de juridiction. En ce sens, le magistrat plaide en faveur de l’application de l’article 186 de la Constitution qui traite de cette question tout en soulignant que le magistrat est passible de la Haute Cour de justice. « Si les autorités refusent d’obtempérer, nous allons saisir la Cour interaméricaine des droits de l’homme sur l’arrestation du juge », a-t-il annoncé. À ce sujet, les magistrats sont déjà en discussion avec la Fédération des barreaux d’Haïti, a révélé Jean Wilner Morin, président de l’ANAMAH, estimant que le pouvoir judiciaire est persécuté. Selon lui, seul ce pouvoir est fonctionnel dans le pays, se basant sur le dysfonctionnement du Parlement et le constat fait par le Conseil supérieur du pouvoir judicaire (CSPJ) de la fin du mandat du président de la République, Jovenel Moïse. «Les yeux sont rivés sur le pouvoir judiciaire pour diriger le pays, voilà pourquoi la Cour de cassation attire la foudre», soutient le juge Jean Wilner Morin. De son côté, le président du RENAMAH, qui dit avoir rencontré l'accusé à la Direction centrale de la police judiciaire le jour de son arrestation, a apporté des explications sur ce dossier. Le juge Ikenson Edumé, rapportant les propos du juge Dabrésil, a fait savoir que ce dernier a été arrêté en son domicile après avoir été gazé dans sa chambre. En plus, le juge Dabrésil avait confié à son collègue qu'il a été roué de coups par des agents de la PNH qui étaient encagoulés au moment des faits. Yvickel Dabrésil précise qu'il n'est pas le propriétaire de toutes les armes en circulation sur les réseaux et qu'il a signé le procès-verbal pour celles qui sont affectées à sa sécurité malgré le fait qu'on voulait le contraindre de signer pour les autres. «Personne n’est au-dessus de la loi, mais l'arrestation du juge Dabrésil est faite dans des conditions troubles», a avancé, de son côté, le magistrat Marthel Jean Claude, président de l'Association professionnelle des magistrats. Le magistrat a souligné que le juge Dabrésil a été arrêté aux environs de 3 heures du matin par des agents de l'USGPN, qui en principe n'ont pas la mission d'officiers de police judiciaire, en dehors de toute procédure fixée par la loi. L'arrestation et la détention du juge sont illégales, a soutenu le juge Marthel Jean-Claude. Les faits, a-t-il affirmé, ne sont pas concordants. Il rappelle que le magistrat Dabrésil jouit du privilège de juridiction parce qu'il n'y a pas de flagrance. «On ne peut pas parler de coup d'État car le magistrat n'a pas été trouvé en train de planifier le coup d'État. Il n'a pas attaqué le président. Il a été arrêté à son domicile. Dans le cas où il y aurait flagrance, la loi trace une procédure pour abourtir à l'arrestation d'un juge», a t-il expliqué.